L. latine 130.  >
À Johannes Antonides Vander Linden,
le 28 novembre 1659

[Ms BIU Santé no 2007, fo 83 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Antonides Vander Linden, à Leyde.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Pour répondre à votre dernière, je vois qu’il me faut d’abord vous en remercier, tout comme de l’amour que vous me portez. Quant à M. Rompf, [2] je témoigne solennellement vous être redevable à son égard, pour m’avoir fait connaître et donné un si grand ami. C’est un homme honnête, vertueux, loyal et sincère, et en un mot, vraiment fraternel : de tous les étrangers que j’ai rencontrés, je n’en ai jamais connu de meilleur. Vous n’avez donc pas à me remercier de ce qu’il soit devenu pour moi un ami si fidèle et si précieux, et en cela, c’est bien plutôt moi qui suis en dette envers vous. Je viens de recevoir la feuille qui manquait à votre Gassendi[3] je l’ai immédiatement donnée à M. Angot [4] qui m’a promis de faire le nécessaire pour que vous la receviez bientôt. Il va la placer dans un colis qu’il prépare. Le paquet que je vous ai promis vous sera bientôt remis, voilà un mois qu’il est parti d’ici. Il contient trois parties : la première est pour vous, la deuxième pour M. van Horne, [5] la troisième pour M. Utenbogard à Utrecht. [6] Dans celle qui vous revient, vous trouverez quelques petites choses : je n’avais alors en effet rien d’autre sous la main à vous expédier, bien que j’eusse voulu vous envoyer quelque chose de meilleur et de plus précieux, en compensation de tout ce que je vous dois. Ces petits riens sont : l’Hortus de Denis Joncquet, in‑4o ; [7] les Opuscula de Des Gorris, in‑4o ; [8] sept de nos thèses ; [9] l’Invitatio amplissimi Ordinis par Guillaume Du Val, in‑4o ; [1][10][11] François Umeau in Circulationem Harveianam, in‑4o ; [12][13][14] l’Histoire notable sur les merveilleux effets de la saignée, in‑4o ; [2][15][16] Opuscula Medica duo de Merlet, in‑12 ; [17] la Bibliotheca chronologica de Philippe Labbe, in‑24 ; [18] l’Eau de couperose, in‑12 ; [3][19] le Paradoxum orthodoxum de Henri Bourgeois, in‑8o ; [20] le vesperiarum actus de François Pijart, etc. [4][21][22] Excusez le petit nombre, je vous en enverrai de plus gros et de meilleurs une autre fois, si de nouveaux rejetons ont agrandi le troupeau, et si Dieu l’a voulu et m’en a rendu capable. En attendant, je serai en dette envers vous, mais je ne serai ni mauvais payeur, ni ingrat débiteur. J’ai de la mémoire et sais fort bien que depuis longtemps je vous dois de l’argent ; mais vous, entretemps, attendez patiemment qu’un meilleur sort nous échoie, vous comme moi ; des temps plus doux nous en pourvoiront généreusement. M. Merlet, notre ancien, pense à publier ses commentaires in Historias epidemicas Hippocratis ; mais, en raison de son grand âge, il doit s’y accrocher car il est presque octogénaire. [5][23] Si vous faites imprimer vos thèses, faites en sorte qu’elles nous parviennent. [24] Du Rabelais, je ne puis rien vous écrire d’autre que ceci : M. Elsevier a promis il y a six mois une nouvelle édition de cet auteur à un certain étudiant parisien, du nom de M. Brochant ; lequel a voulu s’en enquérir auprès de vous, tandis qu’il était en Hollande, mais vous n’étiez alors pas chez vous. [6][25][26][27] Mes fils vous saluent et vous font leurs recommandations. [28] Par décret solennel de notre Faculté, mon Carolus a été élu et déclaré professeur de pathologie pour l’année qui vient ; il commencera ses leçons dans les Écoles de médecine lundi prochain, 24e de novembre ; il s’instruira en cette matière pour pouvoir l’enseigner, il apprendra tout en enseignant. [29] Vinum novum, amicus novus, veterascet, et cum suavitate bibes illus : [7][30] il n’a pas encore 27 ans. Pour ma part, aux Pâques prochaines, je donnerai lecture au Collège royal d’un Tractatum de natura et historia simplicium medicamentorum purgantium, etc. [8][31][32][33] Je m’enquerrai de l’Hippocrate de Calvus : si je n’en trouve aucun, je vous enverrai celui que j’ai ici afin que vous n’en soyez pas plus longtemps privé. [9][34][35][36] Dans vos Selecta, au milieu de la page 178, qui est Slendrianus ? [10][37] Je salue de tout cœur tous vos docteurs et professeurs, en particulier MM. Vorst, van Horne et Gronovius, [38][39] et vous prie de bien vouloir m’acheter les deux livres suivants : l’Oratio inauguralis que David Blondel a prononcée à Amsterdam, 1651, et l’Historia navalis d’Anton Thys. [11][40][41] Mais en attendant, très distingué Monsieur, vale et vive, et continuez de m’aimer comme vous faites.

De Paris, le 28e de novembre 1659.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johannes Antonides Vander Linden, ms BIU Santé no 2007, fo 83 vo.

1.

Invitatio amplissimi Ordinis duas complectens Oratiunculas, quarum prior habita fuit in majore consistorio Senatus, posterior in primo ordine Curiæ subsidiorum, die 2. Junii anni 1612. Pro medicorum Parisiensium solemni et publica panegyri, quam paranymphum vocant… Auctore Guillelmo Du Val…

[Invitation présentée à une très éminente Compagnie, {a} contenant deux petits discours, dont le premier a été prononcé devant la Grand’Chambre du Parlement, et la seconde devant la première chambre de la Cour des aides, le 2 juin 1612, par Guillaume Du Val… {b} Pour le paranymphe, {c} qui est le panégyrique public et solennel des médecins de Paris…] {d}


  1. Le Parlement de Paris.

  2. V. note [10], lettre 73, pour Guillaume Du Val, professeur royal de philosophie grecque et latine nommé en 1606.

  3. V. note [8], lettre 3, pour les nouveaux licenciés de médecine qu’on appelait paranymphes et pour le discours (paranymphe) que l’un d’entre eux (ou parfois une personnalité extérieure à la Faculté) prononçait en leur honneur et à la gloire de l’École.

  4. Paris, François Jacquin, 1612, in‑4o.

    Claude-Pierre Goujet (v. note [3] du manuscrit 2007 de la BIU Santé) a décrit cet opuscule à propos des études médicales Du Val (première partie, page 84‑85) :

    « Il se mit donc sur les bancs, fut fait licencié le 24 mai 1612 et prit ensuite le degré de docteur. L’année même de sa licence ; il fut chargé par la Faculté d’inviter aux paranymphes le Parlement et la Cour des aides, et il s’acquitta de cette commission avec honneur. Il fit en ectte occasion deux discours : le 1er en la Grand’Chambre du Parlement, qui avait à sa tête Nicolas de Verdun, premier président ; {i} le 2e à la Cour des aides, en présence de M. Chevalier, qui était alors premier président ce dette cour. {ii} Il reçut de grands applaudissements de ces magistrats ; ils promirent de se rendre à l’invitation, et le firent en effet. L’assemblée était indiquée pour le 3e de juin. Ce jour-là, Charles Le Pescheur, professeur au Collège de Calvi, {iii} fit publiquement l’éloge de Du Val ; et celui-ci y répondit par un autre discours latin, où il donne un abrégé de sa vie et fait un grand éloge de la médecine. Du Val fit imprimer ces différents discour la même année. »

    1. Nicolas de Verdun ne dut nommé premier président qu’en 1616 ; en 1612, cette charge était dans les mains d’Achille i de Harlay : v. note [49] du Patiniana I‑2.

    2. V. note [14] du Bornoniana 10 manuscrit pour Nicolas Chevalier.

    3. Charles Le Pescheur a été recteur de l’Université de Paris en 1615 ; v. note [44] du Borboniana 3 manuscrit pour son Collège de Calvi.

V. notes :

2.

Histoire notable sur les effets merveilleux de la Saignée. Par M. François Landrey, docteur en médecine (Paris, Pierre Variquet, 1648, in‑8o), avec Approbation signée Guy Patin et datée du 4 octobre 1648.

L’ouvrage contient :

V. note [10], lettre 560, pour l’essai anatomique de François ii Umeau « contre la circulation harveyenne » (Poitiers, 1659).

3.

Eau de couperose, pour se délivrer, et pour se préserver de plusieurs maladies (sans nom d’auteur ; Paris, Gaspard Meturas, 1652, in‑12).

La couperose, autre nom du vitriol (v. note [13], lettre 336), regroupe plusieurs sulfates auxquels les alchimistes attribuaient quantité de vertus dans le traitement des maladies ou dans la transformation du plomb en or.

V. notes [14], lettre 557, pour les « deux Opuscules médicaux » de Jean Merlet (Paris, 1659), et [3], lettre latine 129, pour la « Bibliothèque chronologique » du P. Philippe Labbe.

4.

V. note [5], lettre 577, pour le « Paradoxe orthodoxe » de Henri Bourgeois (possible pseudonyme de Pierre Petit) sur la nature humorale du sang (Paris, 1659), et [13], lettre 22, pour le « discours de vespéries » de François Pijart (Paris, 1635).

5.

V. note [4], lettre 346, pour les commentaires de Jean Merlet « sur les Épidémies d’Hippocrate », restés inédits.

6.

V. note [4], lettre 574, pour l’édition des Œuvres de M. François Rabelais que les Elsevier allaient alors entreprendre à Amsterdam (parue en 1663).

7.

« Vin nouveau, ami nouveau, laisse-le vieillir, tu le boiras avec délices » (L’Ecclésiastique, v. note [8], lettre 206).

V. note [13], lettre 587, pour l’élection de Charles Patin au professorat de pathologie de la Faculté de médecine de Paris, pour un an, le 18 novembre 1659.

Nul ne louera jamais assez les vertus de l’enseignement pour accroître les connaissances du professeur.

8.

« Traité sur la nature et l’histoire des médicaments purgatifs simples » : v. note [24] des Leçons au Collège de France.

9.

V. note [5], lettre latine 91, pour l’Hippocrate (en latin) de Marcus Fabius Calvus (Bâle, 1526). Johannes Antonides Vander Linden travaillait alors à sa propre édition d’Hippocrate (Leyde, 1665, v. note [11], lettre 726).

10.

Dans un paragraphe consacré aux gaz intestinaux de ses « Morceaux choisis médicaux » (Leyde, 1656, v. note [29], lettre 338), Johannes Antonides Vander Linden pimentait deux citations de Jacques Houllier et de Jérôme Cardan avec cette remarque (page 178) : In talibus commentariis secure Slendrianus dormire solet [En présence de tels commentaires, un « Slendrien » a coutume de s’endormir paisiblement] ; v. note [2], lettre latine 132, pour le retour de Guy Patin sur ce mot après l’explication que Vander Linden lui a fournie.

11.

Les deux livres que désirait Guy Patin étaient :

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 83 vo.

Clariss. viro D.D. Ant. Vander Linden, Leidam.

Ut postremæ tuæ respondeam, Vir clariss. gratias primùm mihi agendas video pro illa, et
pro amore in me tuo. Quod spectat ad D. Romphium, sanctè Tibi testor me ejus
nomine Tibi debere, quod illum mihi indicaveris, et tantum amicum dederis, virum bonum
sanctum, fidum et candidum, verbo dicam verè Germanum : ex tot extraneis qui me aliàs
convenerunt, nullum unquam novi meliorem : itaq. tamen abest ut inde mihi debeas, quin
potiùs Ego Tibi id eo debeo, quod sit mihi amicus tam constans et tam pretiosus.
Folium quod deerat in Gassendo, nuper accepi, et illico dedi D. Angot, qui promisit se
effecturum ut brevi accipias, ideóq. se inclusurum in quodam fasciculo quem adornabat[.]
Fasciculus Tibi promissus brevi Tibi reddetur ; hinc enim abijt ante mensem. Tres
sunt illius partes ; 1. est tua : 2. D. Van Horne : 3. D. Utenbogard, Ultrajectini. In
illa parte tua deprehendes paucula : neq. enim tunc temporis aliud mihi suppetebat quod
mitterem, quamvis etiam aliquid melius et amplius pretiosius mittere voluissem, pro tam me
quæ Tibi debeo : paucula illa sunt : Dion. Ioncquet Hortus. 4. Gorræi Opuscula. 4. Thes[es]
nostras septem. Gul. du Val Invitatio amplissimi Ordinis. 4. Franc. Ulmus in Circul[a-]
tionem Harveïanam. 4. Histoire notable sur les merveilleux effets de la Saignée. 4.
Merleti Opuscula Medica duo. 12. Phil. Labbe Bibliotheca Chronologica. 24. Eau de
couperose. 12. Henr. Citadini Paradoxum Orthodoxum. 8. Fr. Pijart Vesperiarum
actus
, etc. Excusa numeris exiguitatem : aliàs majora melioràq. mittam si fœtura
gregem suppleverit, si Deus voluerit, et ego potuerim : interea Tibi debebo, sed
non fiam malum nomen, nec ingratus debitor : habeo animum memorem, et apprime
scio me jamdudum esse in ære tuo : tu v. interea patienter expecta meliorem sor-
tem tuam et meam : quam suppeditabunt mitiora tempora. Senior noster Merletus
cogitat de editione suorum Commentar. in Historias Epidem. Hipp. Et re vera debet
grandioris ætatis ratione ad eam se accingere, est enim prope octogenarius. Si Dispu-
tationes illæ tuæ typis mandentur, fac ut ad nos usque devehantur. Nil aliud
possum de Rabelæso scribere præter hoc unum : ante sex menses novam illius Autho-
ris editionem promisit D. Elsevirius cuidam Parisino studioso dicto D. Brochant,
qui Te quoque tunc quæsivit quum esset in Hollandia, sed tunc abeas. Filij
mei Te salutant, et gratias agunt : Carolus meus solemni Facultatis
nostræ Decreto electus est ac renuntiatus in Professorem Pathologicum
hujus anni : prælectiones suas inchoabit in Scholis Medicorum, die Lunæ proximo, 24. Nov. D Hac
arte discet ut docere possit, docebit quoque et discet. Vinum novum, amicus
novus, veterascet, et cum suavitate bibes illus :
nondum attigit annum ætatis
27. Ego proxima Quadragesima in Schola regia dabo Tractatum de natura et
historia simplicium medicamentorum purgantium,
etc. % Vestros omnes Doctores ac Professores,
præsertim v. DD. Vorstium, Van Horne, Hornium et Gronovium ex animo saluto :
Teq. rogo ut velis mihi emere duos sequentes libros : nempe Dav. Blondelli Orationem
inauguralem habitam Amstelodami
, 1651. et Ant. Thysij Hist. navalem.
Interea v. Te vir sapientissime, vive, vale, meq. quod facis amare perge.

Parisijs, 28. Nov. 1659.

% De Hipp. Calvi inquiram : quod si nullum deprehendam, meum quem hîc
habeo ad Te mittam, ne diutius careas. In Selectis tuis pag. 178. media pag. quid
est Slendrianus ?

Viro clariss. D. Seb. Scheffero.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johannes Antonides Vander Linden, le 28 novembre 1659

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(Consulté le 26/04/2024)

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