Séance du mercredi 12 décembre 2018

Chirurgie urologique : prise en charge actuelle des tumeurs de vessie
14h30-17h00, Les Cordeliers
Présidence : Richard VILLET / Modérateurs : Morgan ROUPRET, Marc-Olivier BITKER (Paris)

 

 

Compte-rendu de la première séance publique de la Société Académique Royale de Chirurgie du 18 décembre 1731

LE FLOCH-PRIGENT P

Résumé
Matériel : Ms. 16 de l’Académie Nationale de Médecine, 16 rue Bonaparte, Paris 6ème. Méthodes : lecture (français du 18ème siècle, manuscrit), photographies (Damien Blanchard) au banc, tirages papier, et réécriture manuscrite. But de l’étude : étudier le contenu du compte-rendu de la 1ère séance de la « Société Académique de Chirurgie » et le résumer  pour sa première partie = pages numérotées de I à XII en chiffres romains. Les différentes pages étaient rapidement analysées. Conclusion : le compte-rendu de la première séance existait, détaillé, conservé et en très bon état. Il était lisible dans un français assez peu différent de celui actuel de 2018. Il comprenait deux parties de longueur égale. La deuxième partie : p. 1 à 13 était celle des parties préparées (nous l’analyserons ultérieurement). Le 18 décembre 1731 était un mardi, la séance suivante se tint le 24 décembre 1731 en raison de Noël. La « SOCIETE ACADEMIQUE de CHIRURGIE », deviendra seulement plusieurs années plus tard «ACADEMIE ROYALE de CHIRURGIE» selon la volonté du Roi LOUIS le XVème du nom.

 

Introduction de la séance

VILLET R, MARRE P, FICHELLE JM, PASCAL G

 

Introduction thématique de la séance

VILLET R, ROUPRET M

 

Tumeur de vessie n'infiltrant pas le muscle à haut risque non répondeurs au BCG: quelles options?

LARRE S

Résumé
Les tumeurs de vessie sont à plus de 95% des carcinomes urothéliaux. Leur prise en charge est basée sur une résection endoscopique initiale permettant de confirmer le diagnostic et de déterminer le degré d’envahissement local (stade T). On distingue ainsi les tumeurs de vessie n’infiltrant pas le muscle (TVNIM) qui représentent près de 80% des tumeurs au diagnostic, des tumeurs de vessie infiltrant le muscle (TVIM) dont la survie globale à 5 ans après traitement optimal (chimiothérapie néoadjuvante et cystectomie) est d’environ 55%.
Les TVNIM ont un pronostic variable qui dépend globalement du stade, du grade et de volume tumoral. On distingue ainsi :
- Les tumeurs à risque d’évolution faible pour lesquels une simple surveillance est mise en place.
- Les tumeurs à risque intermédiaire qui récidivent dans plus de 2/3 des cas sur une forme identique et qui nécessitent un traitement préventif sous la forme d’instillations endo vésicale itératives d’une chimiothérapie (mitomycine C) ou d’une immunothérapie (BCG).
- Les tumeurs à risque élevé dont le risque principal est la progression vers une TVIM dont le pronostic plus mauvais qu’une TVIM au diagnostic initial.
Le traitement préventif des formes à risque élevé repose sur un complément de résection endoscopique, la réalisation d’instillations endo-vésicales de BCG, la surveillance rapprochée et dans certains cas sur la cystectomie d’emblée.
Ces dernières années, la production de BCG a connu des tensions au niveau mondial et des restrictions d’utilisation ont dues être mises en place. Cette communication abordera les alternatives à la BCG thérapie : la Mytomicine C et ses diverses modalités d’administration, la Gentamicine et enfin immunothérapie de nouvelle génération, tout en soulignant les difficultés d’accès à ces différentes thérapeutiques et les enjeux économiques sous-jacents.

 

Cystectoprostatectomie et dérivation urinaire intracoporéale par voie robotique: mythe ou réalité ?

PARRA J

Résumé
L’essor de la voie d’abord robotique en urologie a permis de diminuer certaines contraintes imposées par la laparoscopie utilisée au cours de la cystectomie radicale chez l’homme.
Les principaux avantages du robot Da Vinci sont une vision en 3 dimensions (3D) grâce à une caméra avec deux canaux optiques et une liberté́ de mouvement grâce à des instruments multiarticulés avec 7◦ de liberté́, permettant une dissection plus fine et des sutures plus précises en rapport avec un confort ergonomique jamais atteint en laparoscopie. Différentes équipes ont rapporté́ les résultats de la cystectomie radicale laparoscopique par voie robot-assistée.
Une des principales interrogations au début de l’ère robotique était la sécurité́ carcinologique.
Une revue systématique des résultats oncologiques après cystectomie robot-assistée montre des résultats carcinologiques similaires à ceux obtenus en chirurgie ouverte.
Les résultats concernant les marges sont similaires à ceux obtenus en chirurgie ouverte. On retrouve entre 0 et 25 % de marges positives tous stades et séries confondus. Le taux baisse entre 4 et 9 % pour les centres à plus de 100 procédures. La qualité́ du curage ganglionnaire ne semble pas être altérée pour les patients opères au robot. On retrouve en moyenne 19 ganglions pour un curage standard, 37 pour un curage étendu. Dans une étude de l’IRCC, Raza et al. objectivent un faible taux de récidive précoce et un faible de taux de carcinose péritonéale qui diminue proportionnellement avec l’expérience chirurgicale.
En termes de survie, les résultats actuellement disponibles sont à interpréter avec précaution car majoritairement issus d’études rétrospectives. En revanche, les résultats préliminaires de l’étude RAZOR (premier essai contrôlé́ randomisé de grande ampleur) montrent que la survie sans récidive et la survie globale à trois ans sont comparables entre les deux groupes.
La CPT-LRA est techniquement faisable pour le traitement des TVIM localisée même si la voie d’abord incisionelle reste à ce jour la technique chirurgicale dite « de référence » pour le traitement des TVIM. La voie robot-assistée est une voie d’abord prometteuse pour contribuer à la diminution de la morbidité́ de cette intervention mais au prix d’une courbe d’apprentissage longue qui impose souvent de développer cette intervention en équipe.

 

Impact des variantes histologiques des tumeurs de vessie sur le protocole de chimiothérapie et l’immunothérapie.

COMPERAT E

Résumé
Depuis quelques années, une attention toute particulière a été portée sur les variantes histologiques du cancer de la vessie. En effet, il a été montré que ces différents sous-types histologiques avaient des survies différentes. De plus, les données moléculaires et les classifications qui en ont découlées, ont montré que ces différentes variantes (aussi bien histologiques que moléculaires) réagissaient de façon inégale et aléatoire aux différents protocoles de chimiothérapie et d’immunothérapie (1, 2).
La nouvelle classification OMS 2016 des tumeurs vésicales a identifié et reconnu certaines variantes histologiques, nécessitant pour le pathologiste de bien les identifier pour mieux classifier les tumeurs, permettant d’aboutir à des cohortes de patients plus homogènes, avec en ligne de mire une meilleure évaluation de la survie et du pronostic. Par exemple, le carcinome à cellules en bague à châton, avant classé dans le groupe des adénocarcinomes, a été déplacé et inclus dans celui des carcinomes plasmocytoïdes et indifférenciés, pour en souligner toute son agressivité (3).
Nous savons aujourd’hui, grâce à la recherche clinique, que certaines de ces variantes histologiques ne réagissent pas à la BCG-thérapie, comme le carcinome micropapillaire tant qu’il n’infiltre pas le muscle détrusor, mais 10% d’entre eux ont une surexpression (en cas de stade pT2-4) de la protéine HER2, ce qui pourrait influencer et avoir un impact dans la prise en charge thérapeutique (4).
Les classifications moléculaires ont aussi montré que certains carcinomes du groupe « squamous cell carcinoma-like » (proches du carcinome épidermoïde) et des carcinomes à différenciation neuronale (proches du carcinome neuroendocrine) réagissent très bien à la chimiothérapie néoadjuvante, même s’ils ont une survie moins bonne que les autres carcinomes urothéliaux (5-8). De plus, les carcinomes de type « luminal infiltrated » qui ressemblent aux carcinomes urothéliaux plus classiques, semblent bien répondre à la chimiothérapie (9).
Malheureusement, il existe encore de nombreuses questions et inconnues non résolues, néanmoins il apparaît évident que ces variantes histologiques et moléculaires jouent un rôle clef dans le traitement et qu’ils nécessitent une prise en charge thérapeutique différente.

 

Tumeur de la voie excrétrice supérieure: du traitement radical au traitement mini invasif

SEISEN T

Résumé
Le traitement de référence des tumeurs de la voie excrétrice supérieure est la néphrourétérectomie totale avec l’exérèse d’une collerette vésicale. L’intervention chirurgicale débute par la réalisation d’une néphrectomie, qui se fait le plus souvent par voie coelioscopique classique, mais une assistance robotique peut également être utilisée afin de faciliter la dissection du rein. Ensuite, une voie d’abord iliaque homolatérale permet de poursuivre la dissection du bas uretère et de prélever une collerette de vessie périméatique par voie extra-vésicale ou trans-vésicale pour finalement extraire la pièce chirurgicale. Rarement, le méat urétéral peut être désinséré au préalable par voie endoscopique rétrograde afin de faciliter l’exérèse de la collerette vésicale.
Malgré les progrès de la chirurgie radicale vers une voie d’abord mini-invasive, une nouvelle prise en charge conservatrice de l’unité rénale encore moins invasive s’est développée au cours de ces dernières années. Initialement réservé aux patients présentant des indications impératives, comme par exemple un rein unique, le traitement conservateur peut désormais être proposé pour la prise en charge des tumeurs de la voie excrétrice supérieure dites de bas risque. En effet, celui-ci présente une efficacité similaire à la néphrourétérectomie totale pour des patients sélectionnés avec une lésion unifocale de bas grade, <1 cm et d’aspect superficiel au scanner. Ces critères constituent actuellement les indications électives du traitement conservateur des tumeurs de la voie excrétrice supérieure.
Concernant les aspects techniques, l’abord rétrograde endoscopique par urétéroscopie avec vaporisation au laser de la tumeur après biopsie est le plus souvent utilisé, que ce soit pour les lésions urétérales ou pyéliques. Comme pour certaines tumeurs de vessie, une seconde endoscopie rétrograde dans les semaines qui suivent cette procédure peut être proposée afin d’éliminer toute tumeur résiduelle.
Même si elles restent bien moins utilisées, d’autres techniques de chirurgie conservatrice sont disponibles. En particulier, la résection des tumeurs pyéliques par voie percutanée a été abandonnée par la plupart des équipes, notamment à cause du risque élevé d’essaimage et de récidive secondaire au niveau du trajet de ponction du rein. Cependant, l’urétérectomie segmentaire est encore pratiquée dans de nombreux de centres en France et présente l’immense avantage d’être le seul traitement conservateur permettant l’exérèse complète des lésions urétérales avec une analyse histologique et une stadification précise de la pièce d’anatomopathologie. Par rapport à une voie iliaque ouverte classique, l’abord coelioscopique, notamment avec une assistance robotique permettrait d’améliorer les résultats périopératoires liés à cette intervention.
Après une chirurgie conservatrice, quelle que soit la technique utilisée, le rôle des instillations de l’arbre urinaire avec une chimiothérapie ou du BCG reste encore à définir précisément. En effet, contrairement à la vessie, le rein et l’uretère sont des organes de passage, rendant le temps de contact entre l’urine contenant les agents thérapeutiques et la muqueuse urothéliale très court. Ainsi, un gel de mitomycine C est en cours de développement afin de limiter ce problème. Par ailleurs, plusieurs techniques d’instillations du haut appareil urinaire, incluant l’abord percutané antégrade par néphrostomie et l’abord rétrograde par sonde urétérale ou reflux vésico urétéral sur sonde double JJ en place, ont été décrit dans la littérature sans qu’une d’entre elles ne soit devenu la référence à l’heure actuelle. Finalement, en transposant les résultats obtenus après néphrourétérectomie totale, la réalisation d’une instillation endovésicale de mitomycine C après traitement conservateur pourrait permettre de diminuer le risque de récidive intravésicale des tumeurs de la voie excrétrice supérieure même si cela reste à démontrer de manière formelle.
En conclusion, le traitement des tumeurs de la voie excrétrice supérieure évolue de plus en plus vers une prise en charge mini-invasive et conservatrice de l’unité rénale chaque fois que cela paraît possible. Comme dans le reste du domaine de la cancérologie, la personnalisation du traitement chirurgical de ces tumeurs semble être devenu un élément clef de ce qui fait désormais parti d’une prise en charge adaptée au risque évolutif.