Séance du mercredi 25 mai 2011

SECTION INTERVENTIONNELLE
17h30-19h30 - Les Cordeliers

 

 

Résultats à long terme du remplacement trachéal par allogreffe aortique pour carcinome localement avancé.

WURTZ A, PORTE H, CONTI M, HYSI I, DUSSON C, DESBORDES J, LEROY B, COPIN MC, RAMON P (Lille) Présenté par J.P. VILLEMOT
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2011, vol. 10 (4), 021-027

Résumé
Objectif. Evaluer les résultats anatomiques et oncologiques du remplacement trachéal (RT) par allogreffe aortique (AA) pour carcinome localement avancé.
Méthodes. De Mars 2005 à Octobre 2007, 6 patients âgés de 17 à 52 ans présentant un carcinome muco-epidermoïde (n=1) ou adenoïde kystique (n=5) trachéal étendu, ont été opérés, sans immunosuppresseur, d’un RT extensif par AA étayée par une endoprothèse en silicone, avec enveloppement par un lambeau de grand pectoral, et un lambeau additionnel thymo-péricardique, chez les 2 derniers patients.
Résultats. Les greffons se sont transformés en un conduit vascularisé, bordé d’un épithélium de type respiratoire. Cependant, les 4 premiers patients ont présenté une fistule œsophagienne silencieuse (n=3) ou médiastinale (n=1), nécessitant une réintervention (n=3) à 6, 12 et 24 mois. Les 2 derniers, avec lambeau additionnel, ont eu des suites simples. A long terme, les AAs étaient le siège d’une rétraction évolutive, sans évidence d’anneaux cartilagineux, comme observés chez certains modèles animaux. De ce fait, aucun patient n’était sevré définitivement d’endoprothèse.
Néanmoins, le RT assurait chez tous les patients un contrôle local de la maladie et, avec un suivi moyen de 48 mois, 4 patients étaient en vie, dont 3 en rémission complète et exerçant une activité professionnelle à temps complet.
Conclusion. A notre connaissance, aucun autre substitut que l’AA n’a autorisé la réalisation de tels RT extensifs pour tumeur, sans mortalité postopératoire. Afin d’éviter les contraintes d’un stenting prolongé, nous étudions chez l’animal, un modèle construit à partir d’anneaux trachéaux allogéniques et d’une AA revascularisés par enveloppement fascial, au profil biomécanique qui devrait être proche d’une trachée normale.

 

Pathologie colo-rectale : HNPCC

PARC Y (Paris)

Résumé
Le syndrome HNPCC (Hereditary non Polyposis Colo-rectal Cancer) est secondaire à une mutation germinale d’un des gènes du système MMR (Mismatch Repair). Les principaux gènes sont les gènes MLH1 et MSH2. Ce syndrome expose les patients à un risque accru de cancer du côlon et du rectum mais aussi de l’endomètre, de l’ovaire, de l’intestin grêle, de l’épithélium urothélial, et de l’estomac. La chirurgie dite prophylactique n’existe pas véritablement chez les patients ayant un syndrome HNPCC puisqu’il n’est pas proposé d’intervention avant la survenue d’adénome non résécable ou d’adénocarcinome. En cas d’adénome non résécable ou d’adénocarcinome sur le côlon se discute la totalisation de la résection colique en vue de prévenir un risque de second cancer colique. Les deux options se discutent : colectomie segmentaire suivie d’une surveillance rapprochée et la colectomie subtotale. Aucune étude n’a comparé ces deux techniques chirurgicales. Les avantages et inconvénients des deux options doivent être exposés au patient qui participe donc à la décision. En cas de localisation rectale, la discussion doit aussi comparer la résection colo-rectale suivie parfois d’anastomose colo-anale et la colo-proctectomie totale suivie d’une anastomose iléo-anale.
Quant aux risques de cancer de l’endomètre (30% après dix ans de suivi après 35 ans) et de l’ovaire (6% après 10 ans de suivi après 35 ans), ils amènent à proposer une hystérectomie-ovariectomie bilatérale dès l’âge de 35 ans.
Pour les autres manifestations de la maladie, aucun traitement chirurgical prophylactique n’a été évalué ou envisagé. En revanche, une surveillance régulière avec une fibroscopie œso-gastro-dudoénale tous les 4 ans et une exploration du grêle par entéro-IRM ou vidéo-capsule en alternance tous les 2 ans sont proposées. Pour ce qui est de l’exploration de l’appareil urinaire, la cytologie urinaire s’avère particulièrement peu sensible et la réalisation d’examens complémentaires invasifs notamment l’uro-scanner semble peu adéquat. Toutes ses surveillances sont proposées mais aucune n’a fait la preuve de son efficacité pour diminuer le risque de survenue de cancer dit d’intervalle et améliorer la survie des patients ayant un syndrome HNPCC.
Intervenant : M. MALAFOSSE

 

Cancer gastrique diffus héréditaire

MARIETTE C, BUECHER B (Lille, Paris)

Résumé
Les cancers gastriques de type diffus (CGD), associant faible différenciation cellulaire et présence de cellules en « bague à chatons », peuvent être sporadiques ou héréditaires. Les formes héréditaires sont caractérisées par un mode de transmission autosomique dominant et une pénétrance élevée, probablement de l’ordre de 70% à 60 ans. Le diagnostic de cancer CGD héréditaire est généralement plus précoce que dans les formes sporadiques et des cas ont été rapportés à des âges particulièrement jeunes, inférieurs à 18 ans. Le pronostic est redoutable, comparable à celui des formes sporadiques (survie de 10% à 5 ans). Une mutation germinale délétère du gène CDH1, qui code pour la protéine d’adhésion inter-cellulaire E-cadhérine, est identifiée dans 50% des cas environ. Cette altération serait également associée à une augmentation du risque d’autres types tumoraux : carcinomes mammaires de type lobulaire infiltrants et adénocarcinomes colorectaux principalement. Une mutation du gène CDH1 doit être recherchée chez un individu atteint dans les situations cliniques suivantes : (i) au moins deux cas de CGD avérés chez des apparentés au premier ou second degré dont un cas diagnostiqué avant l’âge de 50 ans, (ii) au moins trois cas de cancers gastriques de type diffus avérés chez des apparentés au premier ou deuxième degré quel que soient les âges au diagnostic et par extension, (iii) CGD diagnostiqué à un âge inférieur à 45 ou 40 ans, (iv) association d’un CGD et d’un carcinome mammaire de type lobulaire infiltrant ou d’un carcinome colorectal à cellules indépendantes chez un même individu ou chez des apparentés au premier ou au second degré. Cette recherche pourrait également être indiquée dans les agrégations familiales de carcinomes mammaires de type lobulaire infiltrant non liées à BRCA, en l’absence d’antécédent familial de cancer gastrique. Compte tenu des difficultés et de l’absence d’efficacité démontrée de la surveillance endoscopique, de l’absence de traitement médical préventif permettant de diminuer le risque de cancer et de la gravité des risques carcinologiques, une gastrectomie totale prophylactique doit être systématiquement envisagée chez les individus porteurs d’une mutation du gène CDH1.

 

Pathologie colo-rectale PAF

PARC Y (Paris)

Résumé
La polypose adénomateuse familiale est secondaire à une mutation germinale du gène APC. Il s’agit d’une maladie génétique à transmission autosomique dominante à pénétrance élevée. Le risque principal est celui de voir apparaître au sein des polypes qui apparaissent dès l’adolescence au niveau du côlon et du rectum, un adénocarcinome. Certains patients peuvent présenter des formes atténuées mais la plupart présentent dès l’adolescence des centaines de polypes qui amènent donc à proposer une coloproctectomie totale prophylactique suivi d’une anastomose iléo-anale vers l’âge de 20 ans. En effet, la présence de plus de 5 adénomes dans le rectum incite à ne pas le conserver et s’observe chez la très grande majorité de ces patients. Les techniques chirurgicales se sont nettement améliorées et cette intervention peut maintenant être réalisée par voie coelioscopique sans réalisation d’iléostomie de protection.
Les autres manifestations de la polypose adénomateuse familiale exposant à un risque vital sont principalement les polypes du duodénum qui augmentent le risque de cancer du duodénum par 300 et les tumeurs desmoïdes. Les polypes du duodénum apparaissent généralement une quinzaine d’années après les polypes du côlon et du rectum. Ils requièrent une surveillance endoscopique spécifique. La sévérité des lésions duodénales est alors évaluée par le score de Spigelman. Dans les cas où ce score montre une sévérité élevée et où s’il est mis en évidence de la dysplasie de haut grade, il faut alors proposer une chirurgie prophylactique. La réalisation de polypectomies par voie chirurgicale s’avère inefficace pour prévenir le risque évolutif et il est généralement proposé soit une duodénectomie avec préservation du pancréas soit le plus souvent une duodéno-pancréatectomie céphalique.
Les tumeurs desmoïdes dans la polypose adénomateuse familiale s’observent chez 11 à 13 % des patients. Certains facteurs de risques ont été identifiés : la localisation de la mutation, les antécédents familiaux de tumeur desmoïde et la chirurgie. Aucun traitement prophylactique ne modifie ce risque et aucun traitement médical ne semble actuellement avoir une efficacité démontrée. La chirurgie est proposée chez ces patients chez qui la tumeur desmoïde menace le pronostic vital.
Intervenant : M. MALAFOSSE

 

Cancers médullaires familiaux de la thyroïde : Apport et modalités de la chirurgie prophylactique

NICCOLI SIRE P, CARNAILLE B, CHABRE O, KRAIMPS JL, PEIX JL (Lyon)

Résumé
Les cancers médullaires familiaux de la thyroïde isolés ou intégrés dans le cadre d’une polyendocrinopathie NEM2A ou NEM2B sont liés à une mutation du gène RET dont la recherche permet au sein d’une famille d’identifier les patients exposés .Ces mutations sont multiples et il existe une bonne corrélation génotype – phénotype permettant en fonction du type de mutation de prévoir l’agressivité du cancer médullaire tant en terme d’âge d’apparition que d’évolutivité.
Pour cette raison, il a été individualisé trois groupes de mutations : à haut risque, à risque modéré et à faible risque pour lesquels l’âge indiqué pour une chirurgie prophylactique est variable.
Dès les premiers mois de la vie en cas de NEM2B, le cancer est présent dès l’âge de 6 mois et constant à l’âge de 2 ans avec la possibilité de présenter déjà des métastases ganglionnaires.
Pour les mutations d’agressivité moyenne, une chirurgie avant l’âge de 5 ans est indiquée, le plus souvent entre 2 et 3 ans.
Pour les mutations de faible agressivité, il n’y a pas de consensus.
Au sens strict du terme, une chirurgie prophylactique correspond à une thyroïdectomie avant l’apparition d’une pathologie des cellules C (thyroïde saine), une simple thyroïdectomie totale est suffisante pour prévenir le cancer médullaire.
Compte tenu du doute quant au stade exact de la maladie, à la possibilité de micro-cancer déjà métastatique au niveau ganglionnaire, un curage du compartiment central peut être indiqué en association à la thyroïdectomie.
Celui-ci sera systématiquement réalisé pour les mutations de haut risque.
A l’inverse, pour les mutations de risque modéré ou faible risque, la prise en compte du niveau de Calcitonine peut interférer non seulement sur l’âge de la chirurgie mais sur son étendue. Le risque de carcinome médullaire peut être considéré, en pratique, comme nul chez des sujets présentant un taux de Calcitonine normal et dans ces cas, une simple thyroïdectomie paraît suffisante sans exposer à la morbidité en particulier parathyroïdienne du curage central.
En plein développement depuis une dizaine d’années, la chirurgie prophylactique du cancer médullaire de la thyroïde voit ses indications et ses modalités pratiques s’affiner au fil du temps compte tenu du type de mutation mais également de la valeur de la Calcitonine sérique.
Intervenant : Y. CHAPUIS

 

Chirurgie prophylactique chez les femmes indemnes appartenant à une famille avec syndrome Sein-Ovaire (mutation BRCA1/2)

GIARD S, PUJOL P, LEBLANC E, MORICE P (Lille)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2011, vol. 10 (2), 060-063

Résumé
Quelques chiffres pour situer le problème : Un syndrome héréditaire serait en cause dans 10% des cancers du sein et de l’ovaire. Parmi les facteurs génétiques de forte pénétrance, BRCA1 et BRCA2 sont les plus fréquents mais restent rares dans la population générale (< 1%). L’existence d’une mutation BRCA 1 ou 2 conditionne un risque important de cancer : risque cumulé au cours de la vie de 80% de cancer du sein et de 40 à 65% de cancer de l’ovaire pour BRCA1, 70% de cancer du sein et 10 à 25% de cancer de l’ovaire pour BRCA2.
Les techniques chirurgicales prophylactiques :
L’annexectomie bilatérale (AB) : Elle est proposée autour de l’âge de 40ans et /ou quand le projet parental semble accompli. Son but premier est de réduire le risque de cancer de l’ovaire (de 95%) compte tenu du mauvais pronostic de celui-ci et de l’absence d’alternative d’autre stratégie de dépistage ou de prévention. Elle réduit également le risque d’apparition du cancer du sein chez les patientes pré ménopausées. Sur le plan chirurgical, la voie laparoscopique est recommandée avec exploration systématique et complète du péritoine.
La mastectomie bilatérale (MP) : Elle peut être envisagée sur demande de la femme correctement informée. Cette information portera sur les différents types de mastectomie possibles, la possibilité (ou non) de reconstruction (immédiate ou différée), les différentes techniques de reconstruction possibles avec leur limites, avantages, inconvénients et risques de complications. Le risque résiduel de cancer après MB est vraisemblablement très faible (<2%) et existe quelque soit le type de mastectomie réalisée
Alternatives à la chirurgie prophylactique : Il n’existe aucune stratégie de dépistage ciblé validé pour le cancer de l’ovaire.
Pour le dépistage ciblé du cancer du sein, l’usage actuel est de recommander un examen clinique tous les 6 mois à partir de l’âge de 25ans-30 ans couplé à un bilan d’imagerie annuel comportant mammographie, échographie et IRM.
Cas particulier : femmes appartenant à des familles « sein-ovaire » sans mutation BRAC1/2 identifiée : Pour les femmes appartenant à des familles « syndrome sein-ovaire » documenté par l’analyse de l’arbre généalogique, mais sans mutation BRCA identifiée, certains modèles de calcul permettent à l’onco-généticien de préciser le risque cumulé de cancer. En cas de
risque cumulé très élevé de cancer, l’attitude sera la même que pour les femmes porteuses de mutation.
Ces décisions très lourdes ne se conçoivent que dans le cadre d’une équipe multidisciplinaire comprenant notamment onco-généticien, psychiatre ou psychologue.
Intervenant : B. COUTURAUD