Séance du mercredi 25 juin 2014

SÉANCE COMMUNE AU VAL DE GRÂCE
14h30-17h00 - Ecole du Val-de-Grâce – Amphithéâtre Rouvillois
Co-Présidence : Médecin Général François PONS (Val de Grâce), Daniel JAECK (ANC)

 

 

introduction de la séance

 

Jean Quénu et la guerre 1914-1918

CHAPUIS Y (Paris)

 

Dix ans d’activité des antennes chirurgicales françaises en Côte-d’Ivoire (Opération LICORNE) : bilan de l’activité chirurgicale et réflexions sur l’aide médicale à la population
French forward Surgical Team in Ivory Coast Deployment (Opération Licorne): The place of Medical Support to the Population in ten years of Military Surgical Activity

BONNET S, GONZALEZ F, SAVOIE PH, BERTANI A, HORNEZ E, MOCELLIN N, MATTHIEU L, POICHOTTE A, RIGAL S, PONS F (Clamart) - Service de Chirurgie Viscérale et Générale, Hôpital d’Instruction des Armées Percy, Clamart (1, 2, 5 et 6) Service de Chirurgie Urologique, Hôpital d’Instruction des Armées Sainte-Anne, Toulon (3) Service de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique, Hôpital d’Instruction des Armées Desgenettes, Lyon (4 et 7) Service de Chirurgie Orthopédique, Centre Hospitalier Loire Vendée Océan, Challans (8) Service de Chirurgie Orthopédique et Traumatologique, Hôpital d’Instruction des Armées Percy, Clamart (9) Ecole du Val de Grâce, Paris 5 (10)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2015, vol. 14 (1), 025-032

Résumé
Objectif : Évaluer quantitativement et qualitativement l’activité des chirurgiens généraux et orthopédistes affectés en Antenne Chirurgicale Aérotransportable (ACA) (rôle 2 OTAN) en Côte d’Ivoire depuis 2002 afin d’identifier le panel des pathologies chirurgicales rencontrées et d’analyser la façon dont est dispensée l’Aide Médicale aux Populations (AMP) en situation isolée en Afrique.
Patients et méthodes : Entre septembre 2002 et août 2012, tous les patients opérés dans les différentes ACA présentes sur le territoire ivoirien ont été inclus dans l’étude. Il s’agissait des militaires français et de la population locale ivoirienne dans le cadre de AMP. L’activité chirurgicale a été analysée par spécialités chirurgicales et également subdivisée en « blessés de guerre (BG) », « urgences traumatiques non de guerre (UTNG) », « urgences non traumatiques (UNT) » et « chirurgie réglée (CR) ». Les variables étudiées ont compris les données démographiques (âge, sexe, statut), les circonstances de prise en charge, les organes lésés, les types d’interventions chirurgicales réalisées et les spécialités concernées.
Résultats : Les chirurgiens ont opéré 2559 patients (2816 interventions chirurgicales). La CR a représenté 71,7 % de l’activité chirurgicale, les UNT 18,6 %, les UTNG 8,3 % et les BG 1,4 %. L’AMP a représenté 91,1 % de l’ensemble de l’activité chirurgicale qui s’est répartie en 41,3 % de chirurgie viscérale, 23,1 % de chirurgie des parties molles, 18,8 % de chirurgie orthopédique, 8,5 % de chirurgie gynécologique, 5,2 % de chirurgie urologique, 2,8 % de chirurgie de la tête et du cou, 0,2 % de chirurgie thoracique et 0,1 % de chirurgie vasculaire.
Conclusion : La réalisation de l’AMP en situation isolée nécessite des bases théoriques, techniques et éthiques solides afin d’en garantir le succès.

Abstract
Aims: To quantify and review qualitatively the activity of the military general and orthopedic surgeons deployed throughout Ivorian territory between 2002 and 2012 in French FST (NATO role 2). To confront the epidemiology of the surgical pathologies, the human resources, the logistic capacities and to analyze how Medical Support to the Population (MSP) is achieved in a secluded location in Africa.
Patients and methods: Between 2002 and 2012, all the patients (military personal and local nationals) operated in the different FST deployed in the Ivory Coast were eligible and included in the study. The surgical activity was analyzed and broken down into surgical specialties, war wounds (WW), non war related trauma emergencies (NWTE), non trauma emergencies (NTE) and elective surgery (ES). Demographics (age, sex, status), the circumstances of healthcare management, the wounded organs, the type of surgical procedure as well as surgical specialties were described.
Results: Over this period, surgeons operated on 2559 patients and realized 2816 surgical procedures. ES accounted for 71,7 % of the surgical activity, NTE 18,6 %, NWTE 8,3 %, WW 1,4 %. MSP represented 91,1 % of the global surgical activity. The visceral surgery represented 41,3 % of the activity, soft tissues 23,1 %, orthopedic 18,8 %, gynecology 8,5 %, urology 5,2 %, head and neck 2,8 %, thoracic 0,2 % and vascular surgery 0,1 %.
Conclusion: Over ten years of deployment on the territory, 90 % of the French FST activity was dedicated to MSP covering a large range of surgical specialties for the benefit of the Ivorian people. MSP requires specific skills beyond the original surgical specialty of military surgeons to fulfill the needs of local populations.

 

Expérience chirurgicale française à l'hôpital médico-chirurgical de KaIA (Kaboul International Airport, Afghanistan): Place de la chirurgie orthopédique

BARBIER O, MALGRAS B, OLLATA D, VERSIER G, PONS F, RIGAL S, OLLAT D (Saint-Mandé) - Service de chirurgie orthopédique et traumatologie, Hôpital d'instruction des Armées Begin, Saint Mandé (1, 3 et 4) Service de chirurgie viscérale, Hôpital d'Instruction des Armées du Val de Grâce, 75005 Paris (2)
Texte intégral : E-Mémoires de l'ANC, 2014, vol. 13 (4), 070-074

Résumé
Introduction: En 2009, la France a pris le commandement de l'Hôpital Médico-Chirurgical (HMC) ou rôle 3 de KaIA (Kaboul International Aiport) dans le cadre de son engagement dans l'opération Pamir en Afghanistan. Le but de ce travail était d'analyser l'activité chirurgicale des 4 dernières années et plus particulièrement celle d'orthopédie, afin d'en dégager les particularités et d’améliorer la formation des chirurgiens orthopédistes militaires.
Hypothèse: La chirurgie orthopédique représente la part la plus importante de l'activité en mission, durant lesquelles les chirurgiens doivent s'adapter à des situations et des lésions différentes de celles rencontrées en métropole. La formation des chirurgiens orthopédistes militaires doit répondre à ces spécificités.
Matériel et méthode: Tous les patients opérés entre juillet 2009 et juin 2013 ont été inclus prospectivement dans une base de données informatique. Celle-ci a été revue rétrospectivement afin d'analyser l'activité globale, et plus spécifiquement celle d'orthopédie, en fonction du nombre d'actes opératoires réalisé et de patients pris en charge, du type des lésions et des interventions réalisées.
Résultats: Sur les 4318 interventions réalisées lors de ces 4 années, la chirurgie réglée représentée 53 % de l’activité et les urgences 47%. La chirurgie orthopédique concernait 43% (n=1875) de l’activité globale. Les 2/3 étaient réalisés dans un contexte d'urgence, et 55 % étaient des urgences en lien avec la guerre. Les militaires français représentaient 17% des patients, les patients locaux 47% et les enfants 17%. Prés de la moitié des lésions concernaient les parties molles. Les ostéosynthèses représentaient 20% des interventions, dont 40% d’éxofixation (n=141). Le taux d'amputation était de 6%. La diversité des gestes réalisés était importante allant de la chirurgie d'urgence à la chirurgie réparatrice. La chirurgie de la main représentait 10% des actes.
Discussion/Conclusion: L'activité de ce rôle 3 est comparable à celui des autres rôles 3 en Afghanistan, avec une part importante d'aide médicale à la population et de chirurgie réglée en plus de la prise en charge primaire et/ou secondaire des blessés. La diversité des actes réalisés rend compte du défi que représente la formation des orthopédistes militaires, parallèlement à l'hyperspécialisation du milieu civil. Une formation spécifique pour les chirurgiens en formation est organisée en France par l'Ecole du Val de Grâce à l’initiative de la chaire de chirurgie de guerre comprenant un Cours Avancé de Chirurgie en Mission Extérieure en 5 modules, 3 semestres de chirurgie générale et un stage d'immersion en opération extérieure. Une Formation Professionnelle Continue spécifique serait aussi nécessaire pour les plus anciens, spécifique et hors champ d’expertise.

 

Chirurgie – Gériatrie – Ethique : une triade confortant le rapport entre patient et praticien

PORTIER JJ, DEMORTIERE E, SOUCANYE DE LANDEVOISIN E (Service de Chirurgie orthopédique Pr Eric DEMORTIERE, Laveran, Marseille)

Résumé
La chirurgie se posant comme un art proposant une résolution rapide d’une affection unique, se trouve mise en échec partiel ou total lorsque le patient présente plusieurs maladies. Cette situation est fréquente en gériatrie où se rajoute une autre composante : le vieillissement. Principalement en orthopédie, l’opération devient alors une proposition, qui même en cas d’urgence obligera à convenir du résultat attendu avec le patient. Or, la vulnérabilité, les possibles atteintes cognitives, la perte d’autonomie de la personne âgée, rendent cette convention difficile. Allant jusqu’à poser un questionnement, caractéristique majeure de la démarche éthique.
Ainsi, reliant les termes déjà énoncés de chirurgie, vieillissement, vulnérabilité, convention, l’éthique en ortho gériatrie propose une réflexion conjointe entre le praticien et le patient, basée sur plusieurs axes :
- Celui de la recherche d’un reflet global de la santé incluant thymie et cognition pour connaître la réelle pertinence de l’acte à réaliser.
- Celui du consentement de la personne, parallèle à l’axe précédent, mais incluant son entourage social.
- Celui du sens de l’acte chirurgical, replacé dans le projet de vie du patient, où l’autonomie, la dépendance, le patrimoine seront facteurs prépondérants.
Cet article propose au-delà du développement des termes et axes envisagés l’élaboration de prérequis éthiques à toute chirurgie gériatrique ainsi qu’une discussion sur l’ingérence dans la décision thérapeutique.

 

Aide médicale à la population au sein d'une antenne chirurgicale : expérience d'un chirurgien urologue lors d'une mission Epervier au Tchad

DESFEMMES FR, EZANNO AC, DABAN JL, DUSAUD M, MOLIMARD B, DURAND X, HOULGATTE A Service de chirurgie urologique, hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, Paris, France (1, 4, 5, 6 et 7) Service de chirurgie viscérale, hôpital d’instruction des armées Legouest, Metz, France (2) Service d’anesthésie-réanimation, hôpital d’instruction des armées Percy, Clamart, France (3) 9e antenne chirurgicale aérotransportable (1)

Résumé
Objectif : A partir de l’analyse de l’activité de chirurgie urologique faite par la 9e antenne chirurgicale aérotransportable (9e ACA) au cours de la mission Epervier de septembre à décembre 2013 à Ndjamena, discuter la place de l’urologie dans l’aide médicale à la population (AMP) et du chirurgien urologue au sein des missions extérieures de l’armée française.
Résultats : Parmi les 391 interventions chirurgicales réalisées par la 9e ACA, 90 relevaient de la chirurgie urologique (23 % de l’activité chirurgicale) et concernaient 72 patients. Parmi ces 90 interventions, nous avons catégorisé 101 actes d’urologie. Il s’agissait par ordre de fréquence d’actes d’endoscopiques urinaire (29.8%), de chirurgie des organes génitaux externes (OGE) (29.8%), de chirurgie de la lithiase urinaire (26.8%), de chirurgie prostatique (9%), de chirurgie diverses (4.6%). L’âge moyen des patients était de 37,2 ans (1 – 75 ans). Vingt-quatre patients avaient < 15 ans (33 % des patients). La durée opératoire moyenne des interventions était de 71 min (5 – 240 min). La durée moyenne de séjour des patients était de 5,94 jours (1 - 17 jours). La morbidité précoce (Clavien II à IV) était liée essentiellement à la chirurgie prostatique (5/9 patients) et des OGE (4/26 patients).
Discussion : L’affectation inédite d’un chirurgien urologue au sein d’une antenne chirurgicale a permis d’évaluer sur un théâtre d’opération extérieure africain l’activité de chirurgie urologique dans le cadre de l’AMP. L’accès à des moyens d’imagerie, à un laboratoire de bactériologie et à l’endoscopie (cystoscope rigide) au sein du Centre Médico-Chirurgical (CMC) Epervier a permis de développer une activité urologique importante et variée. Pour des raisons épidémiologiques (patients jeunes), diagnostiques (clinique +/- échographique) et thérapeutiques (techniques chirurgicales simples et reproductibles), la chirurgie du calcul de vessie et des OGE semble la plus adaptée à une activité d’AMP. Ces pathologies urologiques et leur prise en charge chirurgicale méritent d’être enseignées dans le cadre du cours avancé de chirurgie en mission extérieure (CACHIRMEX) à tout chirurgien militaire amené à être projeté en opération extérieure au même titre que l’échographie de l’appareil urinaire et l’endoscopie urologique. La place de la chirurgie pédiatrique dans le cursus de formation des chirurgiens militaires reste à discuter. Le chirurgien urologue participe aux opérations extérieures comme chirurgien « viscéraliste » mais pourrait aussi avoir un rôle d’expert intervenant ponctuellement pour des interventions plus complexes soit lors de missions de courte durée programmées soit par télé conseil chirurgical en évaluant les nouveaux outils de communication.
Conclusion : Les chirurgiens militaires en mission extérieure sont fréquemment confrontés à des pathologies urologiques dans le cadre de l’AMP. Certaines pathologies (calcul de vessie, pathologies des OGE) peuvent être prises en charge simplement par tout chirurgien « viscéraliste » quelle que soit sa spécialité et quel que soit le théâtre d’opération. Le chirurgien urologue a toute sa place dans ces équipes chirurgicales de l’avant mais pourrait aussi devenir leader dans le « mentoring » qu’il soit traditionnel ou innovant.