La décomposition du mouvement, menée à bien par Etienne-Jules
Marey, a exercé une influence extraordinaire dans nombre de disciplines.
Tout d’abord, il réussit à représenter mécaniquement les mouvements
du corps. Il déclencha une véritable révolution en médecine en créant
les moyens de traduire les fonctions invisibles de la vie, comme
le battement du cœur, sous une forme visible et lisible. Tous les
appareils électriques d’enregistrement graphique aujourd’hui en
usage dans les hôpitaux – électrocardiographes, encéphalographes
et oscilloscopes – sont issus des instruments inventés par Marey
voilà plus d’un siècle.
Ensuite, mettant en œuvre les mêmes principes que ceux de sa
méthode graphique, Marey perfectionna l’appareil photographique
pour en faire un instrument scientifique destiné à l’analyse du
mouvement des humains et des animaux qui partagent leur vie sur
cette planète. Wilbur Wright lui-même a suggéré toute l’importance
des recherches de Marey dans le domaine de l’aéronautique, en écrivant
que sans les études de Marey sur le vol des oiseaux, son frère Orville
et lui-même n’auraient jamais pu s’élever dans les airs. La réforme
de l’armée française après la défaite de 1871 fut elle aussi fondée
sur l’étude photographique par Marey de la physiologie des soldats.
Pour quiconque s’intéresse à la naissance des images animées, la
contribution de Marey est décisive, et la source des inventions
postérieures d’Edison et des frères Lumière. Marey fut le premier
à utiliser les images animées pour l’entraînement des athlètes,
et ce n'est que l’une de ses nombreuses et importantes contributions
à l’histoire de l’éducation physique et de la gymnastique. Enfin,
la science européenne de l’ergonomie fut fondée sur ses travaux
relatifs au corps au travail.
En mettant en ligne une partie des 2000 négatifs conservés au
Collège de France, la BIUM nous permet pour la première fois d’apprécier
l'ampleur et la profondeur des recherches de Marey en matière de
photographie et de cinéma. Ces négatifs (montrés en positifs sur
le site Web) furent découverts en 1979 sous les toits de l’Institut
Marey, au moment de sa démolition, lors de l’agrandissement du stade
de Roland Garros : des images allant des premières expériences entreprises
par Marey et par son préparateur Georges Demenÿ jusqu’aux dernières,
prises quelques années avant sa mort. Les plaques ont été classées
ici par ordre chronologique et par expérience.