Sommaire 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
La chronophotographie (1)

Aussi, bien qu'il fût un étonnant progrès, le fusil était encore loin d'être l'instrument photographique idéal pour les recherches de Marey. Par exemple, il donnait les attitudes successives de l'aile de l'oiseau, mais il fallait encore découper chaque image individuelle, les superposer en les recollant le long d'un axe horizontal sur un papier si l'on voulait mesurer la trajectoire de l'aile. Cette contrainte effaçait presque les avantages de l'appareil photographique. De plus, les images produites par le fusil avaient leur défauts ; elles étaient trop petites – à peu près la taille d'un timbre poste – , elles n'étaient pas assez détaillées, il n'y en avait pas suffisamment et elles étaient trop éloignées les unes des autres.

Le fusil ne donnait pas la dimension du mouvement dans l'espace ; il ne fournissait pas la notion du chemin exact ou de la distance traversée dans un temps défini. Cela signifiait que la vitesse du vol ne pouvait pas être déterminée précisément. Puisque Marey avait déjà pu enregistrer ces facteurs avec ses machines graphiques, la machine photographique se devait de fournir au moins ce minimum, sinon plus..

Les étapes suivantes de Marey sont typiques de son approche d'un problème. En général on pouvait s'attendre à ce qu'il voit les aspects d'un instrument qui étaient réussis, et à ce qu'il les réorganise pour dépasser les limites de cet instrument, ou à ce qu'il les utilise pour servir de base à un nouvel instrument. Quelques fois, s'il ne pouvait pas adapter l'instrument au sujet, il adaptait le sujet à l'instrument. Dans le cas présent il fit les deux. Avant de s'attaquer véritablement à l'appareil photographique, il changea le sujet étudié. Durant l'été 1882 il abandonna les oiseaux pour un moment, et utilisa un sujet humain dont les mouvements étaient moins complexes, plus lents, et, mieux encore, se déroulaient le long d'une ligne droite et par terre. Puis, avec un appareil photographique nouveau, il parvint à trouver un moyen pour exposer à la lumière un segment de la plaque photographique à la fois, et pour faire correspondre chaque segment à une phase différente des mouvements de son sujet. Mais cette fois il le fit sans faire bouger la plaque.