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Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit  >

Ms BnF Fr 9730 [page 64] [1]


1.

V. notes :

Le Borboniana mentionnait aussi son traité De Ponderibus et mensuris [Des Poids et mesures] (Tolède, Thomas Gusmanius, 1599, in‑4o de 192 pages, pour la première de plusieurs éditions), sur l’histoire de ce sujet dans l’Antiquité (biblique, grecque et romaine).

2.

« sur n’importe quelle matière ».

Brissæus, Jean de La Brisse, bien qu’il fût historiographe de Gaston d’Orléans (Monsieur, frère du roi Louis xiii), n’a publié aucun livre. La seule autre trace que j’aie su trouver de lui est ce que Guy Patin en a écrit dans sa lettre latine 259 (v. ses notes [3] et [4]) : il l’admirait beaucoup, l’avait en grande amitié et l’y disait mort d’apoplexie, presque octogénaire, vers 1659.

L’allusion de Patin tenait à une remarque sur ce passage (pages 25‑26) de la vie de Georg Richter {a} écrite par son fils Johann Georg : {b}

In Collegio Lysiæ Professorem Artium Humaniorum Virum Doctissimum, Iohan. Brissæum, qui nuper e Gasconia Lutetiam se contulerat, memoriter perorantem, summa cum admiratione, audivit de miraculis Seculi xviimi, quod 1. in Religione, 2. in Rebuspubl. 3. in Eruditione, 4. in rebus mirandis, typographia potissimum et navigatione, prioribus Seculis partim comparavit, partim prætulit. Qui ut eloquentia (qua non raro Viros Principes ex Aula Regia in attentionem Lectionum publicarum provocavit) vix quempiam habebat parem : ita æmulum suum passus est Johan. Valentem, Præceptorem primæ Classis in Collegio, quod vocant, Boncour. Hic, quia famam Brissæi multorumque discentium concursum frequentem ferre non poterat, ideo in discursus et judicia plane perversa, cæco æmulandi studio vel potius ardore prolapsus, se, iratum dicebat, intra triduum Oratorem effecturum, ut Cicero JCtum.

[Il écouta, avec immense admiration, Jean de La Brisse, très savant professeur d’humanités dans le Collège de Lisieux. Récemment arrivé à Paris, venant de Gascogne, {c} il discourait sans notes sur les prodiges du xviie siècle, qu’il rendait soit égaux, soit supérieurs à ceux des siècles précédents, en matière 1. religion, 2. d’affaires publiques, 3. d’érudition, 4. de découvertes étonnantes, particulièrement dans les domaines de l’imprimerie et de la navigation. {d} Il n’avait guère d’égal en éloquence (en quoi il n’était pas rare que ses leçons publiques retinssent l’attention des premiers magistrats du Parlement), à tel point qu’il s’est permis de rivaliser avec Pierre Valens, régent de la classe de première dans le Collège qu’on appelle Boncourt. {e} Parce qu’il ne pouvait supporter la réputation de La Brisse et la grande affluence de ceux qui venaient écouter ses leçons, cet homme, mû par le souci, ou plutôt l’ardeur aveugle de le défier, s’est laissé aller à des propos et à des avis si pervertis qu’il disait, dans son emportement, parvenir en trois jours à être un orateur et jurisconsulte égal à Cicéron].


  1. 1592-1651, v. note [2], lettre 734.

  2. Nuremberg, 1662, v.  note [1], lettre latine 237.

  3. Passage mentionné dans la lettre latine 259 (v. sa note [3]).

  4. En ces matières, on aurait plutôt attendu les xvexvie s. que le xviie, mais c’est bien xviie s. qui est imprimé dans le livre.

  5. Dans sa même lettre latine 259 (v. sa note [5]), Guy Patin a demandé à Johann Georg Volckamer de remplacer ici Jean par Pierre Valens (professeur de grec au Collège royal de 1619 à sa mort en 1641).

    V. note [24], lettre 106, pour le Collège de Boncourt à Paris.

3.

Guy Patin a parlé du partisan (traitant ou financier) nommé La Brisse (prénom inconnu), frère de Jean, qui fut taxé lors des condamnations qui suivirent celle de Nicolas Fouquet en 1664 (v. note [14], lettre 782).

4.

François Joulet (1550-1627), sieur de Châtillon, fut successivement nommé aumônier ordinaire du roi Henri iv (1593), chantre et chanoine d’Évreux (1601), prédicateur ordinaire du roi (1602), puis coadjuteur de l’évêque de Coutances (1603, avec promesse de succession future qui ne fut pas tenue). Il a publié :

L’autre principal souvenir qu’il a laissé est lié à son rôle dans la fondation de l’hospice parisien des Incurables, {a} mis en lumière par Léon Brièle dans son livre intitulé De l’Origine de l’Hospice des Incurables : François Joulet de Châtillon (Paris, Imprimerie nationale, 1885, in‑8o). On y lit ces détails sur la famille de Joulet (pages 6‑7) :

« Un certain Pierre Joulet, seigneur de Bellival en Picardie, ruiné par les guerres qui, au xvie siècle, désolèrent cette province, se serait établi à Rosny-sur-Seine, près de Mantes, chef-lieu d’une seigneurie appartenant à la famille de Vendôme, et dont l’administration lui aurait été confiée. Plus tard, Pierre Joulet serait venu habiter Mantes où il aurait exercé le commerce, action jugée alors basse, roturière, et qui entraînait la dérogeance.

La situation de fortune de la famille Joulet s’étant relevée, les fils de Pierre Joulet sollicitèrent et obtinrent du roi Henri iii un mandement, daté de Chenonceaux (13 juin 1577), qui les rétablit en tous les droits et prérogatives de noblesse. {b}

Ces fils, dénommés dans l’acte, étaient Antoine Joulet, conseiller et maître des requêtes de la reine Catherine de Médicis, Jean Joulet, lieutenant général au bailliage de Mantes, Pierre Joulet, lieutenant général au bailliage de Dreux, et Laurent Joulet.

Le nom de François Joulet ne figure pas dans cette pièce ; faut-il croire qu’il était seulement neveu et non fils de Pierre Joulet, ou que, encore mineur, il ne pouvait être question de lui dans ce mandement royal ? Je pencherais volontiers vers cette dernière hypothèse. » {c}


  1. V. note [13], lettre 286.

  2. Pièce justificative (page 51‑54) : Mandement du roi Henri iii qui rétablit les fils de Pierre Joulet de Châtillon en tous les droits et prérogatives de noblesse, perdus par ledit Pierre Joulet qui avait exercé commerce à Mantes.

  3. Cette conclusion est surprenante car François Joulet était âgé d’environ 27 ans au moment du mandement royal produit à l’appui de sa généalogie. Il n’est en outre nulle part écrit dans le livre de Brièle que Pierre Joulet a été trésorier de France, comme disait le Borboniana.

Une notice ultérieure intitulée Les Inscriptions de l’Hôpital de la Charité, signée Ern. Coyecque (Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’ïle-de-France, Paris, Honoré Champion, 17e année, 1890, pages 165‑166), décrit la famille Joulet, mais en supposant que François était petit-fils et non fils de Pierre, le marchand de Mantes.

Ces deux sources insistent sur la richesse et la charité de François Joulet : il fit plusieurs donations en faveur des jésuites du faubourg Saint-Germain, de l’Hôpital de la Charité, ou de la « chaire de lecture et controverse contre les hérésies et les schismes » qu’il fonda au Collège de Navarre. « Par son testament, en date du 11 novembre 1625, François Joulet institua l’Hôtel-Dieu de Paris son légataire universel ; sa fortune devait être consacrée à l’établissement d’un hospice spécial pour les maladies incurables. » Je ne suis donc parvenu à identifier avec certitude ni le père de François Joulet (peut-être frère ou fils de Pierre), ni le frère du dit François qui lui survécut .

V. note [20], lettre 146, pour Jacques Davy Duperron, cardinal en 1604, et évêque d’Évreux de 1592 à 1606.

5.

« et le voilà donc maintenant septuagénaire. La vieillesse est en soi une maladie [Térence, v. note [29], lettre 418]. »

V. note [19], lettre 34, pour Maffeo Barberini (1558-1644), qui avait été élu pape en 1623, sous le nom d’Urbain viii.

6.

Chapitre iii, Des maladies de cette année, de la Pantagruéline prognostication (ou Almanach) de François Rabelais (v. note [9], lettre 17), auquel Guy Patin (qui pourrait bien être auteur de cet article du Borboniana) a plus brièvement emprunté dans plusieurs de ses lettres. La transcription complète de ce chapitre permet de mieux savourer le sel de la citation :

« Cette année, les aveugles ne verront que bien peu ; les sourds ouïront assez mal ; les muets ne parleront guère ; les riches se porteront un peu mieux que les pauvres, et les sains mieux que les malades. Plusieurs moutons, bœufs, pourceaux, oisons, poulets et canards mourront, et ne sera si cruelle mortalité entre les singes et dromadaires. Vieillesse sera incurable cette année à cause des années passées. Ceux qui seront pleurétiques auront grand mal au côté ; {a} ceux qui auront flux de ventre iront souvent à la selle percée ; les catarrhes descendront cette année du cerveau aux membres inférieurs ; le mal des yeux sera fort contraire à la vue ; les oreilles seront courtes et rares en Gascogne plus que de coutume. {b} Et régnera quasi universellement une maladie bien horrible et redoutable, maligne, perverse, épouvantable et malplaisante, laquelle rendra le monde bien étonné, et dont plusieurs ne sauront de quel bois faire flèche, {c} et bien souvent composeront en rêvasseries, syllogisant en la pierre philosophale, et aux oreilles de Midas. {d} Je tremble de peur quand j’y pense car je vous dis qu’elle sera épidémiale, et l’appelle Averroès, vii, colliget, {e} faute d’argent.

Et attendu la comète de l’an passé et la rétrogradation de Saturne, mourra à l’hôpital un grand maraud tout catarrhé, et croûtelevé ; {f} à la mort duquel sera sédition horrible entre les chats et les rats, entre les chiens et les lièvres, entre les faucons et canards, entre les moines et les œufs. » {g}


  1. V. note [10], lettre 40.

  2. « Les Gascons avaient la réputation d’être des voleurs ; or ces derniers risquaient l’essorillement [supplice consistant à couper les oreilles] » (note de M. Huchon).

  3. « On dit proverbialement qu’un homme ne sait plus de quel bois faire flèche, pour dire qu’il ne sait plus quel métier prendre pour subsister » (Furetière).

  4. V. notule {a}, note [14], lettre 584.

  5. « Référence fantaisiste » (M. Huchon) à Averroès (v. note [51] du Naudæana 1). Dans le contexte, colliget peut se traduire par : « qu’on se serre la ceinture ».

  6. Galeux ou vérolé.

  7. Tous ces truismes et autres extravagances tissent une satire hilarante des Centuries de Nostradamus (contemporain de Rabelais, v. note [5], lettre 414) et aux délires des autres vaticineurs de même espèce.

7.

« La Maison d’Autriche approche de sa fin ».

Troisième personne du subjonctif du verbe adesse [être présent], adsit peut se traduire (dans le contexte de cet acronyme) par « qu’il en advienne ainsi ».

V. notes :

8.

V. supra note [7] pour l’archiduc Albert d’Autriche.

L’archiduché de Graz, ou de Styrie, était un petit État du Saint-Empire situé aux confins de l’Autriche et de la Croatie actuelles. Son souverain faisait partie de la famille impériale et pouvait prétendre à la succession de la couronne. Avant la mort de Rodolphe ii (1612), l’archiduc de Graz était son neveu, le futur empereur Ferdinand ii de Habsbourg, qui régna de 1619 à 1637 (v. note [7], lettre 21).

Albrecht von Waldstein ou Wallenstein (1583-1634), noble originaire de Bohème, fut le plus célèbre mercenaire impérial de la guerre de Trente Ans. Vaincu à la bataille de Lützen par les Suédois, il continua la guerre, mais finit par trahir son camp et fut assassiné sur l’ordre de Ferdinand ii.

9.

François et Ferdinand de Médicis étaient deux des quatre fils de Cosme ier, grand-duc de Toscane de 1537 à 1574 (v. note [49] du Naudæana 2).

Cet article du Borboniana contient trois erreurs biographiques :

    François avait été grand-duc de Toscane avant et non pas après son frère cadet Ferdinand ;

  1. seul Ferdinand avait été cardinal avant de devenir grand-duc ;

  2. François et Ferdinand eurent tous deux des enfants légitimes, mais François mourut sans laisser de fils (et non d’enfants), ce qui permit à Ferdinand de lui succéder à la tête du duché de Toscane.

10.

« Voyez de Thou, tome 4, page 208 » ; Histoire universelle de Jacques-Auguste i de Thou, livre lxxxviii, règne de Henri iii, année 1587 (Thou fr, volume 10, pages 75‑76) :

« François de Médicis, grand-duc de Toscane, qui avait épousé en premières noces Jeanne d’Autriche, et à qui il ne restait plus que deux filles de ce mariage, depuis la mort de Philippe son fils, arrivée il y avait cinq ans, se voyant sans enfants mâles, quoiqu’il eût encore épousé depuis Blanche Capellia, que le Sénat de Venise avait adoptée, avait déclaré par son testament le cardinal Ferdinand de Médicis, son frère, héritier de son État, un des plus considérables de l’Italie. {a} François mourut subitement le 9e d’octobre, et il fut suivi cinq heures après de Blanche, son épouse : soit que son heure fût alors venue, soit que la douleur d’une si grande perte avançât ses jours. {b} Le grand-duc avait eu d’elle, avant son mariage, un fils nommé Antoine. Au reste, des deux filles qu’il laissait, l’aînée, nommée Éléonore, avait déjà épousé Vincent de Gonzague, prince de Mantoue. À l’égard de Marie, la cadette, elle resta longtemps sans époux, mais elle fut bien dédommagée de ce retardement par l’alliance glorieuse qu’elle contracta depuis avec Henri iv qui, après son divorce avec la reine Marguerite, {c} sœur de Henri iii, jeta les yeux sur elle pour en faire son épouse ; et à son retour de Savoie, couronné des lauriers qu’il venait de cueillir, il célébra à Lyon cet heureux mariage. » {d}


  1. V. supra note [9], pour la confirmation de ces détails sur la vie et la descendance du grand-duc François ier de Médicis.

    En 1579, François de Médicis, veuf en 1578, avait épousé sa maîtresse Bianca Cappellia (ou Cappellio, Venise 1548-Florence 1587), ainsi devenue duchesse de Toscane. Les chronologies modernes la disent défunte le lendemain de la mort de son mari, survenue le 19, et non le 9 octobre (vii Eid. viii br. dans l’original latin) 1587, décalage qui incite à penser que de Thou se référait curieusement ici au calendrier julien des protestants.

  2. Prudente manière d’éluder l’éventualité d’un empoisonnement criminel des deux époux (que le Borboniana disait accidentel). Né en 1576, Antoine, leur fils unique, mourut en 1621, sans être jamais devenu grand-duc.

  3. V. note [4], lettre latine 456.

  4. Le 17 décembre 1600.

Contrairement à de Thou, dont le récit est exact, le Borboniana persistait dans son erreur en mélangeant les biographies des deux frères, François et Ferdinand de Médicis. Il convient de le rectifier et de comprendre que :

11.

« ainsi son destin l’avait-il fixé. »

Le duc Henri de Joyeuse (1563-1608) était le frère puîné du duc Anne de Joyeuse, {a} et l’aîné du cardinal François de Joyeuse. {b}

Henri de Joyeuse eut une double carrière, civile et religieuse : marié en 1581 à Catherine de Nogaret de La Valette, sœur de Jean-Louis, duc d’Épernon, {c} la mort de son épouse (1587) le décida à se faire capucin, sous le nom de Père Ange ; après avoir adhéré à la Ligue, il quitta l’état monastique pour devenir gouverneur du Languedoc ; il se rallia à la cause royale en 1596 et Henri iv le nomma maréchal de France ; tout en conservant son duché, Henri de Joyeuse reprit ensuite le froc et se consacra aux pieux devoirs de son Ordre. Il mourut au couvent des capucins de Rivoli en Italie.

Du mariage de Henri de Joyeuse et de Catherine de Nogaret de La Valette, était née en 1585 une fille unique, Henriette-Catherine de Joyeuse. {d} En 1597, dans sa 13e année d’âge, elle épousa en premières noces Henri de Bourbon, duc de Montpensier (1573-1608), qui avait refusé la main de Marie de Médicis (au dire du Borboniana). De cette union naquit Marie, dite Mademoiselle de Montpensier, {e} première épouse éphémère de Monsieur, Gaston d’Orléans, frère du roi Louis xiii.


  1. Mort en 1587, v. première notule {b}, note [47] du Borboniana 8 manuscrit.

  2. V. note [17], lettre 88.

  3. V. note [12], lettre 76.

  4. Morte en 1656, v. note [20], lettre 372.

  5. V. note [55] du Borboniana 5 manuscrit.

12.

« Je suis amateur de chair, mais non de graisse » : ainsi Martial concluait-il son épigramme c (livre xi), consacrée à ses préférences féminines.

13.

Charles ier, roi d’Angleterre, Philippe iv, roi d’Espagne, et Victor-Amédée ier, duc de Savoie, étaient les trois prestigieux gendres de Marie de Médicis (v. supra note [9]) ; malgré quoi, en 1638, exilée depuis sept années de son royaume (dont elle avait été régente de 1610 à 1614, puis était demeurée en exercice effectif jusqu’en 1617), elle errait lamentablement entre les Pays-Bas et la Grande-Bretagne sans trouver ni accueil ni asile à la hauteur de son rang.

La veuve de Henri iv (en 1610), mère de Louis xiii, n’avait jamais remis le pied sur le sol de France quand elle expira à Cologne le 3 juillet 1642, cinq mois avant le décès du cardinal de Richelieu, son mortel ennemi, le 4 décembre de la même année.

14.

Cette référence a été ajoutée dans la marge du manuscrit.

Catéchisme ou Introduction au Symbole de la Foi, divisée en quatre parties. Où il est traité De l’œuvre admirable de la création du monde, De l’excellence de notre Foi et Religion Chrétienne, Du mystère de notre Rédemption, et autres mystères de la Foi. Composée en espagnol par le R.P. et Docteur Louis de Grenade de l’Ordre de saint Dominique, {a} et mise en français par N. Colin, chanoine et trésorier de l’église de Reims. {b}

Cet ouvrage abonde en considérations sur l’impossibilité de prouver la foi par la raison, {c} mais je n’y ai pas trouvé d’allusion explicite à la pierre philosophale. {d} À titre de purs exemples, guidé à tâtons par Aristote et son « premier mobile », {e} et faute mis la main sur une édition in‑4o qui ne soit pas anachronique, j’ai retenu deux professions de philosophie chrétienne, inspirée par la foi.

15.

« Assujettir notre pensée à l’obéissance du Christ » (saint Paul, Deuxième épître aux Corinthiens, 10:4‑5, v. note [15] du Naudæana 2).

16.

« il y a simplement besoin de foi, et non de science ; elle n’est pas contre la nature, mais outrepasse la nature » (sans source latine identifiée).

17.

« parce que la théologie ne prouvait rien, il l’appelait donc l’art de douter. »

Il pouvait s’agir ici, mais ça n’est qu’une fragile supposition, du médecin Jean Tournier (docteur régent de la Faculté de Paris en 1614, mort en 1624, v. note [44], lettre 183) car il était natif de Langres, où Nicolas Bourbon avait son canonicat (rappel qui établit un lien ténu avec l’article suivant du Borboniana).

18.

Amadis Jamin (ou Jamyn, 1540-1593) naquit et mourut à Chaource, petite ville de la Champagne humide (Aube), à 30 kilomètres au sud de Troyes, aux limites de la Bourgogne, mais dépendant du diocèse de Langres (v. note [1], lettre 29), évêché situé à environ 120 kilomètres plus à l’est. Dans le sillage de Pierre de Ronsard (v. note [19], lettre 455), Jamin fut l’un des poètes prisés par la cour des rois Charles ix et Henri iii, puis se retira en Champagne. Il a fondé le collège de Chaource. Ses Œuvres poétiques ont été réunies (Paris, Mamert Patisson et Robert Estienne, 1575, in‑4o).

Le Borboniana ajoute ici qu’il était grenetier (au sens probable d’officier des gabelles, v. note [8], lettre latine 40) à Châtillon-sur-Seine, au nord de la Bourgogne (Côte-d’Or), un peu au sud de la ligne joignant Chaource à Langres. Selon Nicolas Bourbon, Jamin avait des doutes sur l’existence des diables et des sorciers, mais le pli de la reliure du manuscrit empêche de savoir depuis combien d’années il menait des recherches sur ce sujet auprès des curés des villages qu’il visitait.

V. note [27], lettre 337, pour Edmond Richer.

19.

Dans deux de ses lettres de 1652 (10 mai et 25 octobre), Guy Patin s’est plaint de la rareté des éditions alors disponibles des œuvres de François Rabelais : en 1638, la dernière datait de 1626 (sans lieu, in‑8o), et les précédentes, des années 1570 et 1580. V. aussi là-dessus l’éloquent témoignage d’Antoine Le Roy (1er extrait de son Floretum) dans la note [16], lettre 240.

Se confesser est ici à prendre dans le sens latin de « déclarer », confiteri. V. note [3], lettre 997, pour le poète latin François Guyet (mort en 1655, âgé de 80 ans).

20.

Je n’ai pas trouvé d’autre référence à ce quatrain sodomite.

V. notes :

Le premier degré (ou chef) d’accusation était (en principe) celui qui était passible des peines les moins lourdes. Le sens de l’expression « accusé de sodomie jusqu’au premier degré » n’en demeure pas moins obscur ; mais dans la législation actuelle des États-Unis d’Amérique, le premier degré de sodomie est une accusation grave, qui qualifie le viol anal.

21.

V. notes :

22.

« Voyez l’Histoire d’Espagne de Juan Mariana, page 514. »

Dans la traduction française de L’Histoire générale d’Espagne de Mariana {a} par le R.P. Joseph-Nicolas Charenton, {b} cette référence correspond au livre xxix (année 1506, page 564), On propose de remarier la reine, qui le refuse :

« Les grands ne voulant pas que Ferdinand eût la régence, s’opposaient à son retour en Castille ; {c} et pour l’empêcher d’y remettre le pied, on proposa de remarier la reine. {d} Le marquis de Villena avait en vue de lui faire épouser le duc de Calabre, du même sang qu’elle et de la royale Maison d’Aragon. {e} Les autres aimaient mieux qu’elle épousât le prince D. Alphonse d’Aragon, fils de l’infant D. Henri, l’unique prince qui restât alors du sang royal de Castille et d’Aragon, et qui descendît en ligne masculine et légitime de ces deux augustes maisons. {f} Les affaires allèrent si avant que les seigneurs, qui avaient entrepris de ménager ce mariage, promirent une riche principauté et de magnifiques récompenses à Marie d’Ulloa, qui avait le plus de part dans les bonnes grâces et dans la confiance de la reine, si elle pouvait adroitement y faire consentir cette princesse. La nouvelle favorite s’acquitta fidèlement de sa commission ; et ayant ménagé une occasion favorable, elle proposa à la reine ce mariage ; mais la princesse, rejetant avec horreur cette proposition, “ Dieu me préserve, lui dit-elle, de commettre un crime si énorme. Eh quoi, c’est vous qui osez me proposer un nouveau mariage ! Qu’on ne m’en parle plus jamais. ”

Il ne laissait pas de s’en trouver quelques-uns qui étaient d’avis qu’on la mariât au roi d’Angleterre, qui le souhaitait fort, quoiqu’il fût dans un âge très avancé. {g} Le bruit se répandit, on ne sait pas sur quel fondement, que le roi catholique avait résolu de marier la reine sa fille à Gaston de Foix, seigneur de Narbonne, petit-neveu et beau-frère de Sa Majesté catholique. {h} Il est incroyable combien ce bruit supposé éloigna les esprits de ceux qui paraissaient le plus attachés à Ferdinand : leur zèle commença beaucoup à se ralentir ; ils ne parurent plus si vifs sur ses intérêts et son parti devint le plus faible. »


  1. V. supra note [1].

  2. Paris, 1725, v. note [10], lettre latine 56.

  3. Un an après la mort de son épouse, Isabelle la Catholique (1504), reine de Castille, le roi Ferdinand d’Aragon (v. note [4], lettre 692) s’était remarié avec Germaine de Foix (1488-1536), fille de Jean de Foix et de Marie d’Orléans, sœur du roi de France Louis xii.

  4. Les grands d’Espagne contestaient à Ferdinand la souveraineté de Castille qui appartenait en titre à sa fille Jeanne, dite la Folle, que son aliénation mentale rendait incapable de régner efficacement (v. notes [18][22] du Borboniana 8 manuscrit).

  5. Le marquis de Villena, Diego Lopez Pacheco et Portocarreo (vers 1447-1529), était un grand d’Espagne très attaché à la légitimité de la Couronne de Castille.

    Un autre Ferdinand d’Aragon (1488-1550), duc de Calabre, était fils du roi de Naples, Frédéric d’Aragon (destitué en 1501, v. note [38] du Naudæana 2), et cousin du roi Ferdinand le Catholique. En 1526, Charles Quint maria ce prince sans couronne à Germaine de Foix, veuve du roi Ferdinand (mort en 1516). Il devint ainsi vice-roi de Valence.

  6. Alfonso de Aragon y Portugal (1489-1562) était fils de l’infant Enrique de Aragon y Pimentel (1445-1522).

  7. Henri vii, roi d’Angleterre, était alors âgé de 59 ans (v. note [8], lettre 869).

  8. Gaston de Foix (1489-1512), duc de Nemours, frère cadet de Germaine (v. supra notule {a}), était alors gouverneur du Dauphiné. Le marier à Jeanne aurait de nouveau rapproché les couronnes de Castille et d’Aragon.

23.

« bien qu’elle eût des intervalles de lucidité ».

Tous les projets de remariage décrits précédemment avaient de très lourdes conséquences dynastiques (v. supra note [22]). Ils se tramaient tandis que Charles Quint (v. note [32], lettre 345), fils et héritier présomptif de Jeanne la Folle, n’était âgé que de six ans. Leur échec lui permit, dix ans plus tard, à la mort de Ferdinand le Catholique, de prendre possession de la Couronne d’Espagne, réunissant l’Aragon et la Castille.

V. la citation 3, note [22] du Borboniana 8 manuscrit, pour l’incarcération définitive de Jeanne la Folle sur l’ordre de son fils Charles Quint.

24.

V. notes [38] du Borboniana 1 manuscrit et [23] du Borboniana 8 manuscrit pour L’Onosandre de Guillaume i Bautru et sa cible, Hercule de Rohan, duc de Montbazon.

25.

« le plus médisant des genres d’hommes ».

Le distique latin qui précède (dont il existe des variantes) a été attribué à Érasme, ou bien plutôt à un anonyme qui voulait tourner Érasme en dérision :

« Je fus trois fois corbeau, {a} trois fois pie, {b} trois fois lié par une corde, {c} trois fois marqué d’une croix, {d} mais je suis resté tel que j’étais auparavant. » {e}


  1. Entièrement noir comme l’habit des ermites augustins (v. note [2], lettre 117).

  2. Noir et blanc comme l’habit des dominicains (ou jacobins, vnotre glossaire).

  3. C’est-à-dire cordelier (franciscain, vnotre glossaire).

  4. Les mathurins (ou trinitaires v. note [2], lettre 55) portaient une robe blanche avec une croix rouge et bleue sur le ventre.

  5. On dit (Furetière) :

    « que l’habit ne fait pas le moine, pour dire que ce n’est pas assez de prendre un habit de moine, il faut aussi vivre selon sa règle. Ce proverbe est ancien, et se trouve dans le Roman de la Rose, et vient de la question qu’on a agitée autrefois, s’il suffisait du noviciat et de l’habit pour être capable d’un bénéfice régulier. Il a été jugé que non, et qu’il faut être profès : ce qu’on doit entendre pour les collations ordinaires, car il en vient plusieurs de Rome pro cupiente profiteri, {i} ce qui oblige seulement à se faire moine dans six mois. »

    1. « dans l’intention de prononcer leurs vœux ».

26.

Sur cette vibrante apologie d’Érasme contre ses détracteurs, v. notes :

Ses Adages sont omniprésents dans notre édition. À tous ces ouvrages admirables, le Borboniana ajoutait :

27.

« Au moment où Origène {a} pénétra dans l’auditoire, Plotin {b} se tut. On lui demanda pourquoi l’entrée d’un misérable petit Grec le rendait muet, il répondit, dit-on : “ Quand paraît le Soleil, les étoiles cessent de luire. ” Voyez Baronius à l’an du Christ 248, ii. » {c}


  1. V. note [16] du Patiniana I‑2 pour Origène, théologien du iiie s. originaire d’Alexandrie, Père de l’Église.

  2. Plotin, philosophe gréco-romain du iiie s., originaire d’Égypte, a fondé le néoplatonisme (v. note [46] du Borboniana 7 manuscrit) en mêlant la philosophie des Perses et des Indiens à celle de Platon. Origène adhérait à sa secte, ce qui lui valut (comme on va le voir) d’être contesté par l’Église romaine.

  3. Référence aux Annales ecclesiastici [Annales ecclésiastiques] de Baronius, {i} ajoutée dans la marge du manuscrit, correspondant à la colonne 434 du Tomus secundus (année 248) : {ii}

    ii. Origenis Apologia ad Fabianum PP. Origenes autem, cum tot tantaque a se scripta iam edita haud facile corrigere aut emendare posset, aut vellet ; hac una tantum via suæ integritati consulere satis arbitratus, rectæ fidei, professionem primo ad Fabianum Romanum Pontificem, tamquam ad totius Catholicæ Ecclesiæ Præsulem, mox ad alios misit Episcopos ; intexuit illam Eusebius in sua pro Origene (ut testatur) scripta Apologia, quæ excidit. Quid autem ad hæc Fabianus, acquieverit necne, ea tantum ab eo scripta fidei confessione contentus ; nihil præterea Eusebius scribit, et (ut puto) dolo reticuit ; quippe qui (ut sæpe superius demonstravimus) quæ essent tantum eius laudis, memoriæ commendavit ; reliqua vero, quibus reprehensione non caruit, vel tacuit, vel certe excusavit. Verum quod plane certum atque compertum habeamus, Origenem his Philippi Imperatoris temporibus Romam se contulisse ; par est credere, eum a Fabiano in re tanta ad dicendum causam fuisse vocatum : vel, quod ille non recepisset ab eo scriptam fidei confessionem, ipsum sponte Romam apud eum se purgaturum accessisse.

    iii. Origenes Romam veniens quid cum Plotino. De adventu autem Origenis Romam Philippi tempore, nihil penitus Eusebius, qui prioris tantum illius adventus tempore Zephyrini papæ (ut vidimus) meminit. At venisse ipsum Romam his temporibus, cum Plorinus Romæ doceret. Porphyrius in Vita Plotini perspicue demonstrat, dum hæc ait de eo Romæ publice profitente : Cum Origenes aliquando venisset in scholas, Plotinus statim genas rubore suffusus assurgere voluit. Sermones vero ab Origene continuare rogatus, respondit, Studium loquendi cessare, quando qui loquitur, animadvertit se ad illos, qui idem ipsi noverint, verba facturum. Atque ita, cum pauca quædam disseruisset, inde surrexit. hæc Porphyrius : qui et quantæ æstimationis habitus fuerit Origenes etiam ab externis, his plane verbis demonstrat, itemque ex testificatione Longini alias recitata, dicentis : In secundo genere Platonici quidam Ammonius atque Origenes, quibuscum nos diu versati sumus, vitis profecto intervallo non parvo sui sæculi philosophos intelligentia superantibus.

    [ii. Apologie d’Origène adressée au pape Fabien. {iii} Néanmoins, comme Origène ne pouvait ou ne voulait aisément corriger ou amender tout ce qu’il avait déjà écrit et publié, ayant jugé que c’était le seul moyen d’examiner son intégrité et la rectitude de sa foi, il envoya une déclaration, d’abord au pontife romain Fabien, comme chef de toute l’Église catholique, et bientôt après aux autres évêques. Eusèbe {iv} (ainsi que lui-même en atteste) l’a insérée dans l’Apologie, aujourd’hui perdue, qu’il a écrite en faveur d’Origène. Sans dire s’il approuvait ou non ce texte, Fabien se contenta de n’y voir qu’une confession écrite de sa foi. Eusèbe n’en écrit pas plus et il a (à mon avis) trouvé plus adroit de garder le silence, car (comme nous l’avons très souvent montré) il ne s’est souvenu que de ce qui contribuait à la gloire d’Origène ; quant à tout ce qui n’était pas irréprochable en lui, ou bien il l’a tu, ou bien il l’en a disculpé. Nous tenons cependant pour tout à fait certain et établi qu’Origène s’est rendu à Rome au temps de l’empereur Philippe ; {v} il est donc juste de croire que Fabien a appelé Origène à défendre sa cause dans une affaire de si grande conséquence : le pape n’ayant pas accepté la profession de foi qu’il avait écrite, Origène vint à Rome de son propre chef pour se justifier.

    iii. Origène vient à Rome, son échange avec Plotin. Eusèbe n’a pas détaillé la venue d’Origène à Rome sous le règne de le Philippe, mais n’a mentionné (comme on l’a vu précédemment) que sa présence sous le pontificat de Zéphyrin. {vi} Il s’est néanmoins rendu à Rome du temps où Plotin y enseignait. Porphyre {vii} le montre en effet clairement dans sa Vie de Plotin quand il parle de son enseignement à Rome : « Origène vint une fois dans son auditoire, Plotin rougit et voulut se lever. Origène le pria de continuer. Plotin répondit que l’envie de parler cessait lorsqu’on était persuadé que ceux que l’on entretenait savaient ce qu’on avait à leur dire. Et après avoir parlé quelques instants, il se leva. » {viii} Ces mots de Porphyre montrent à quel point Origène était estimé, même par les étrangers, tout comme en a témoigné ailleurs Longin, en disant : « Durant leurs existences, qui furent presque contemporaines, Ammonios {ix} et Origène, platoniciens de la nouvelle espèce que j’ai longtemps fréquentés, ont surpassé en intelligence les philosophes de leur siècle. »] {x}

    1. V. note [6], lettre 119.

    2. Cologne, Iannes Gymnicus et Antonius Hieratus, 1609, in‑4o de 864 colonnes.

    3. Le pape Fabien a régné sur l’Église romaine de 236 à 250. Origène protestait alors auprès de lui contre son exclusion de la prêtrise, liée à ses opinions théologiques, que le patriarche d’Alexandrie avait jugées hérétiques.

    4. Eusèbe de Césarée, v. note [23], lettre 535.

    5. L’empereur Marcus Julius Philippus, dit Philippe l’Arabe (car il était né dans la province romaine d’Arabie pétrée) a régné de 244 à 249.

    6. Le pape Zéphyrin a régné de 198 à 217.

    7. Porphyre de Tyr (234-vers 310), philosophe néoplatonicien, disciple de Plotin, a écrit en grec la vie et publié les écrits (Ennéades) de son maître.

    8. Traduction directe du grec en français, publiée par Marie-Nicolas Bouillet dans Les Ennéades de Plotin… précédées par la … (Paris, L. Hachette et Cie, 1857, in‑8o), tome premier, Vie de Plotin, § xiv, page 16.

    9. Ammonois Saccas, (v. note [46] du Borboniana 7 manuscrit) a été le maître de Plotin.

    10. Ce propos de Longin (v. note [2], lettre 756) est extrait du Proœmium [Prologue] des Fragmenta [Fragments] (grecs) qu’on lui attribue.

28.

« “ Cette éloquence séculière est en effet le calice de Babylone, où sont offertes toutes sortes de blasphèmes, d’hérésies, de mœurs dépravées, etc., comme dit quelque part Origène. {a}
Tu as par trop honoré tes amis, mon Dieu, dit le Psaume de David. {b}
Mais contre lui les hérétiques se scandalisent à l’excès ; cardinaux, évêques et moines s’abandonnent aux abus ; les catholiques s’affermissent. Les hérétiques reprochent à l’Église romaine son faste, au strict opposé de la simplicité et de la piété des apôtres ; mais eux furent des graines, et nous sommes l’arbre qui fleurit, qui verdit, qui fructifie.
Les tout petits enfants croient tout ce qu’on leur donne à croire, même les plus profondes inepties, comme font aussi les vieillards séniles ; devenus plus grands, d’abord ils ne croient plus à rien, puis ils oscillent d’un extrême à l’autre ; une fois vieux, ils croient sagement ce qui doit l’être, et ne s’y trompent pas, car alors le corps commence à s’affaiblir, mais l’esprit commence à revivre. ” Ces propos ont été recueillis auprès du Père Campanella, et non pas de Nicolas Bourbon. » {c}


  1. Le contenu de cet article du Borboniana et du précédent {i} m’a mené à consulter le :

    Origenis Adamantii Operum Tomi Duo Priores cum Tabulis et Indice generali proxime sequentibus. Quibus nuperrime accessit Fragmentum Commentatiorum ipsius Origenis in Evangelium secundum Matthæum, D. Erasmo Roterodam interprete

    [Deux premiers tomes des Œuvres d’Origène Adamantius, {ii} avec des tables et un index général dans les pages qui suivent immédiatement. Auxquelles a été tout récemment ajouté le Fragment des commentaires du dit Origène sur l’Évangile son Matthieu, dans la traduction de D. Érasme de Rotterdam]. {iii}

    Sans être textuelle, cette citation se réfère à un passage de l’Homilia ii Origenis in Hieremiam [Homélie ii d’Origène sur Jérémie], chapitre ii, De eo quod scriptum est, Fugite de medio Babylonis [Sur ce qu’il a écrit « Fuyez du centre de Babylone » {iv}] (second tome, page 158, première colonne, repère B) :

    Calix aureus Babylon in manu dei inebrians omnem terram. De vino eius biberunt gentes. Propter hoc commotæ sunt gentes, et subito cecidit Bablyon, et contrita est. Nabuchodonosor volens decipere homines per calicem Babylonis dolosum, non miscuit in vase fictili quod parabat potari : sed neque in paulo meliore, et æreo vase, vel stanneo, et quod ista præcellit argenteo, verum eligens vas aureum in eo poculum temperavit, ut quis videns decorem auri, dum radiantis metalli pulchritudine delectatur, et totus oculis hæret in specie, non consideret quid intrisecus latitet, et accipiens calicem bibat, nesciens calicem Nabuchodonosor, intelligens autem calicem aureum in præsenti nominatum. Sed animadvertas pessimorum dogmatum verba mortifera qualem habeant compositionem, qualem decorem eloquentiæ, qualem rerum divisionem : cognosces quo modo unusquisque poetarum qui putantur apud vos disertissimi, calicem aureum temperaverit, et in calicem aureum venenum iniecerit idolatriæ, venenum turpiloquiorum, venenum eorum quæ animam hominis interimunt dogmatum, venenum falsi nomnis scientiæ.

    [Le calice en or est dans la main du dieu de Babylone {v} pour enivrer la terre entière. Les peuples ont bu de son vin. Pour cette raison, les peuples ont été ébranlés, et Babylone a soudain disparu et a été broyée. Voulant duper les hommes par le fourbe calice de Babylone, Nabuchodonosor {vi} n’a pas mélangé ce qu’il offrait à boire dans un récipient en argile ni, ce qui eût été un peu mieux, dans un récipient en airain ou en étain ou, ce qui vaut encore mieux que cela, dans un récipient en argent ; mais non, il a choisi un récipient en or et y a accommodé son breuvage, afin que chacun, voyant la splendeur de l’or, se délecte alors de la beauté du métal étincelant, fixe tous ses regards sur son apparence, sans prêter attention à ce qui s’y cache ; chacun accepte ce calice et boit, en ignorant que c’est celui de Nabuchodonosor, mais en percevant sur-le-champ que c’est un calice en or qu’on lui présente. Vois pourtant que les mots mortifères des dogmes les pires ont le même agencement, la même parure d’éloquence, la même distribution des arguments : sache de quelle manière tout poète, parmi ceux qu’on tient chez vous pour les plus éloquents, aura préparé un calice en or, et y aura injecté le poison de l’idolâtrie, le poison des propos obscènes, le poison de ces dogmes qui détruisent l’âme de l’homme, le poison du faux nom de science].

    1. V. supra note [27].

    2. Surnom d’Origène, qui signifie « dur comme le diamant ».

    3. Lyon, Iacobus Giuntus, 1536, un volume in‑fo divisé en 2 tomes de 260 et 219 pages ;

    4. Jérémie, 50:8.

    5. Babylone (v. note [7], lettre 466), antique capitale du royaume mésopotamien, était pour les Israélites de la Bible, qui y avaient été exilés, le symbole du paganisme et de la débauche. Les protestants qualifiaient Rome de « nouvelle Babylone ».

    6. Souverain de Babylone, destructeur du temple de Salomon au vie s. av. J.‑C. (v. note [7], lettre 498).
  2. Psaumes (138:16) : Mihi autem nimis honorificati sunt amici tui Deus nimis confirmati sunt principatus eorum (Vulgate). La seule belle et fidèle traduction que j’en ai trouvée est celle, janséniste, de Louis-Isaac Le Maistre de Sacy (v. note [5], lettre 867) : « Mais je vois, mon Dieu, que vous avez honoré d’une façon toute singulière vos amis ; et leur empire s’est affermi et augmenté extraordinairement. »

  3. La remarque finale est ajoutée dans la marge du manuscrit, probablement par Guy Patin (mais avec les précautions qu’impose la remarque placée à la fin de la note [21] infra).

    V. note [12], lettre 467, pour le dominicain italien Tommaso Campanella, qui finit ses jours à Paris en 1639 et avec qui Patin a directement conversé en le soignant pour sa goutte, comme il l’a écrit dans sa lettre du 9 septembre 1638 à Caspar i Bauhin (v. sa note [14]).

    Le Borboniana imprimé de 1751 a repris tout ce passage latin (article lxxiii) avec quelques variantes mineures, mais en remplaçant le passage contre les ecclésiastiques qui « s’abandonnent aux abus » par un prudent etc., et sans attribuer ces dires à Campanella.


29.

« Plainte de Campanella au sujet d’un médecin. {a} Je m’afflige que cet homme, que je croyais fort mon ami, m’ait fait défaut en une affaire sans aucune importance. Je me souviens avoir lu en Italie quelque édition de la Métaphysique d’Avicenne, {b} livre qui est ici introuvable. Ce R.M. {c} en avait un exemplaire unique en son étude, mais a refusé de me le prêter quelques jours. Il est certaines gens qui semblent n’être nés que pour eux-mêmes, et ne voudraient en aucune façon rendre service aux autres, même quand cela ne leur coûterait rien. Bon Dieu, comme saint Paul, dans la convulsion des peuples, s’est comporté bien autrement que ce docteur, qui se tient si éloigné des mœurs des apôtres ! “ Je me suis fait juif avec les juifs, afin de gagner les juifs ; je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles ; je me suis fait tout à tous, afin de les sauver tous ; mais je fais tout cela pour l’Évangile, afin d’avoir part à ses biens. ” {d} Caton agissait tout autrement, dans le livre ii de Lucain :

“ Voici quelle fut sa règle rigide : observer la juste mesure, garder le cap et suivre la nature ; passer sa vie au service de la patrie ; se croire être né, non pour soi-même, mais pour le monde entier ; ne manger que pour vaincre sa faim ; quitter son foyer pour un simple abri contre la rigueur de l’hiver, etc. ” » {e}


  1. Titre ajouté dans la marge du manuscrit, qui désigne Tommaso Campanella (v. supra notule {c}, note [28]) comme l’auteur du propos qui suit.

  2. Metaphysica Avicennæ, sive ejus Prima philosophia optime castigata per Reverendum sacræ Theologiæ bachalarium fratrem Franciscum de Macerata ordinis minorum, et per excellentissimum artium doctorem dominum Antonium Frachantanium Vicentinum philosophiam lengentem in gymnasio Patavino.

    [La Métaphysique d’Avicenne, {i} ou sa première Philosophie, excellemment corrigée par le Frère Francesco da Macerata, de l’Ordre des frères mineurs, bachelier en sainte théologie, et par le très brillant Maître Antonio Fracanzano, docteur ès arts natif de Vicence, lecteur en philosophie de la Faculté de Padoue]. {ii}

    1. V. note [7], lettre 6.

    2. Venise, Bernardinus Venetus, 1495, in‑fo de 9 feuiles de 12 pages chacune ; seule édition latine disponible avant 1638.

  3. Dans les années 1630, un médecin parisien qui possédait une riche bibliothèque et dont les initiales étaient R.M. ne pouvait être que René Moreau (v. note [28], lettre 6).

  4. Saint Paul, Première Épître aux Corinthiens, 19:20‑23.

  5. Lucain (v. note [33], lettre 104), La Pharsale, livre ii, sur Caton d’Utique (v. notule {e‑ix}, note [51] du Borboniana 7 manuscrit), vers 380‑385.

Ici se termine le bref propos sur Campanella : deux articles en latin que Guy Patin a pu lui-même insérer dans le Borboniana ; mais tout autant que Nicolas Bourbon, il n’est jamais allé en Italie et n’a pu y feuilleter des livres, ce qui renverrait bien plutôt à Gabriel Naudé. Cela traduit une fois de plus l’entremêlement inextricable du Borboniana, du Patiniana et du Borboniana, qui rend généralement dangereux d’attribuer sûrement un propos qu’ils contiennent à l’un de leurs trois interlocuteurs. Néanmoins, ce qui est dit de Campanella est bien dans la ligne des opinions chrétiennes de Patin : antiromaines, enclines au jansénisme et au calvinisme, mais sans trace de scepticisme athée.

30.

« D’un moine devenu soldat, d’un soldat devenu moine » : titre ajouté dans la marge du manuscrit ; le Borboniana imprimé de 1751 l’a conservé, mais en a maladroitement fait la conclusion de son article lxxiii, c’est-à-dire des propos empruntés à Tommaso Campanella (v. supra note [29]), qui fut certes moine, mais jamais soldat. Une telle ineptie est le prix à souvent payer quand un texte est échantillonné sans discernement.

31.

« Voyez la préface de Paolo Manuzio à Jean de Montluc. »

La Ad Ioannem Monlucium, Christianissimi Regis consiliarium, eiusdemque apud Venetam Republicam oratorem, Pauli Manutii, Aldi filii, in Ciceronis oratorios libros præfatio [Préface de Paolo Manuzio, fils d’Aldo, {a} sur les livres oratoires de Cicéron, adressée à Jean de Montluc, {b} conseiller du roi très-chrétien, et son ambassadeur auprès de la République de Venise] est en tête des :

Ciceronis de Oratore libri iii, Orator, De claris Oratoribus. Corrigente Paulo Manutio, Aldi filio.

[Trois livres de Cicéron De l’Orateur, L’Orateur, sur les brillants Orateurs. {c} Avec les corrections de Paolo Manuzio, fils d’Aldo]. {d}

Elle est longue de six pages et datée de Venise, l’an 1546, avec ce passage sur les exploits diplomatiques du dédicataire (pages A iii vo‑A iiii ro) :

Et cum hæc legatio tibi perhonorifica fuit, tum illud ad tui nominis celebritatem longe maximum accessit, quod cum a principe Turcarum Solymano pacem defessa bellis Europa peroptaret, eaque sine Christianissimi Regis intercessione desperaretur ; unus electus qui tantum muneris obires, acceptis a Rege mandatis, æstate media, summis caloribus in Græciam navigasti, pacem ut componeres, optabatur : composuisti. Hieme summa, dificillimis itineribus, per dispositos equos in Galliam recurristi. exceptus alia cura, cum de sedandis inter Regem tuum, Regemque Britanum magni momenti controversiis ageretur, præfuisti ; te consulente, agente, ultro citroque cursante, abiectis armis pax inter eos firmissimo fœdere constituta. Habes hoc omnino Monluci, non dico a Fortuna, quam casus et temeritas regit, sed a te ipso, qui ad consilium et rationem omnia refers, ut in tuis actionibus felix usquequaque sis.

[Et de même que cette ambassade vous a grandement honoré, {e} de même avez-vous élevé votre nom à la plus grande célébrité quand l’Europe, lassée des guerres, souhaitait vivement conclure une paix avec Soliman, le Grand Seigneur des Turcs, et se désespérait de l’obtenir sans l’intercession du roi très-chrétien : choisi seul pour vous acquitter exclusivement de cette charge, après en avoir reçu les ordres du roi, au milieu de l’été, dans les plus grandes chaleurs, vous avez navigué en Grèce, avec le souhait de négocier une paix, et vous l’avez négociée. {f} Puis, au cœur de l’hiver, par les routes les plus malaisées, vous êtes retourné en France à cheval par relais de poste. On vous y chargea d’une autre mission et vous fûtes présent quand il s’est agi d’apaiser les différends de grande importance entre votre souverain et le roi d’Angleterre : par vos conseils, vos actions, vos incessants va-et-vient d’un camp à l’autre, les armes furent déposées et un pacte très solide a établi entre eux la paix. {g} C’est à vous, Montluc, qu’appartient le mérite de tout cela ; et ce, non par la bonne fortune, que régissent le hasard et l’imprévu, mais par votre propre volonté, car vous vous référez en tout à la réflexion et à la raison, afin d’être partout heureux en vos actions]. {h}


  1. V. note [16], lettre latine 38.

  2. V. notes [27], lettre 229, pour Jean i de Montluc, et [28], lettre 203, pour son frère aîné, Blaise de Montluc, maréchal de France (en 1574), et pour ses Mémoires (Bordeaux, 1592).

  3. Brutus ou le Dialogue sur les brillants Orateurs.

  4. Venise, Alde, 1554, in‑8o de 480 pages.

  5. En 1546, Manuzio célébrait la fin de l’ambassade vénitienne de Montluc.

  6. De 1536 à la fin de son règne (1547), François ier, roi de France, a mené, contre Charles Quint, une politique d’alliance avec Soliman le Magnifique (Grand Turc de 1520 à 1566, v. note [35], lettre 547) au fil d’incessantes tractations, auxquelles Montluc a participé durant l’été de 1545. Il en a laissé deux mémoires qui ont été publiés dans le tome i des Négociations de la France dans le Levant, ou Correspondances, mémoires et actes diplomatiques des ambassadeurs de France à Constantinople et des ambassadeurs, envoyés ou résidents à divers titres à Venise, Raguse, Rome, Malte et Jérusalem, en Turquie, Perse, Géorgie, Crimée, Syrie, Égypte, etc., et dans les États de Tunis, d’Alger et de Maroc édités par Ernest Charrière (Paris, Imprimerie nationale, 1848, in‑4o) :

    • pages 596‑612, Relation de M. de Montluc, depuis évêque de Valence, baillée au roi François ier et à Messieurs de son Conseil privé, à son retour de Levant pour la négociation de la paix ou trêve en faveur de l’empereur Charles Quint et du roi des Romains, son frère (le futur empereur Ferdinand ier de Habsbourg, v. note [19] du Borboniana 8 manuscrit) ;

    • pages 612‑620, Autre plus sommaire relation du dit Montluc sur le voyage et occasion de sa dite légation en Levant, baillée à M. le cardinal de Tournon (v. seconde notule {a‑iii}, note [4] du Patiniana 4).

    Ces pourparlers n’ont abouti à aucun traité procurant la paix universelle dont rêvaient alors les souverains d’Europe. On accusa Montluc d’avoir été maladroit dans ses négociations. Il aurait même été embastillé à son retour en France.

  7. Négociations entre les représentants de François ier et de Henri viii qui aboutirent à une nouvelle paix entre les deux royaumes le 7 juin 1546 à Ardres (en Calaisis), avec promesse non tenue de rendre Boulogne à la France, moyennant deux millions de couronnes d’or. Je n’ai rien trouvé attestant que Montluc ait participé à la conclusion de ce traité.

  8. Les relations historiques que j’ai consultées n’autorisent guère à être aujourd’hui si élogieux sur les talents diplomatiques de Montluc.

32.

Le Borboniana conseillait deux lectures.

  1. Histoire de Henri iii roi de France et de Pologne de Scipion Dupleix, {a} année 1578, page 99 :

    « Quand il fut question de mettre à exécution le dernier édit de pacification fait à Poitiers, {b} il s’y rencontra tant de difficultés et tant de lieux, {c} qu’il semblait que ce fût plutôt un moyen de rallumer la guerre qu’un remède pour l’éteindre. Le roi désirant de le faire entretenir {d} dépêcha en Languedoc (où il y avait plus de rumeur qu’ailleurs) Jean de Montluc, évêque de Valence, pour y adoucir les esprits encore aigris des émotions {e} précédentes ; où il fit si bien par son éloquence que les états de la province assemblés à Béziers au mois d’avril de l’an 1578, déférant entièrement à ses remontrances, promirent de vivre en paix et en bonne union, sous l’obéissance du roi et des édits, sans distinction de religion, les uns prenant la protection des autres.

    Ce grand homme, qui avait fait de très signalés services à l’État, décéda l’année ensuivant à Toulouse. Le malheur du temps lui avait donné quelque mauvaise teinture en ce qui est de la religion, ainsi que j’ai remarqué ci-devant ; de sorte qu’ayant le calvinisme en horreur, il penchait néanmoins au luthéranisme en quelques points, et même pour le mariage des prêtres. {f} Toutefois, Dieu lui fit la grâce de reconnaître ses fautes et ses erreurs à la fin de ses jours et, après avoir réclamé l’infinité de sa miséricorde avec une contrition vraiment chrétienne, < de > quitter ce monde qui l’avait un temps retenu à ses vanités, pour aller prendre possession de la félicité éternelle. »


    1. Paris, Claude Sonnius, 1630, in‑fo de 295 pages, quatrième des cinq tomes de l’Histoire générale de France de Scipion Dupleix (v. note [9], lettre 12).

    2. Publié en septembre 1577.

    3. « En logique, en rhétorique, on appelle lieux, certaines classes et distributions des qualités ou circonstances des choses, qui sont les sources des arguments » (Furetière).

    4. De faire appliquer son édit de pacification.

    5. Émeutes.

    6. La suite de l’article du Borboniana fait allusion au mariage secret de l’évêque de Valence et de son fils Jean ii de Montluc, seigneur de Balagny (v. la fin de la note [33] infra). Dupleix était ici catégorique sur le penchant de Jean i de Montluc vers le luthéranisme, et non vers le calvinisme (qu’il aurait combattu avec acharnement toute sa vie durant).

  2. Deux passages de l’éloge de Jean i de Montluc par Scévole i de Sainte-Marthe (livre iii) retiennent l’attention. {a}

    • Pages 246‑247, discours religieux et moraux :

      « Ô combien les doctes et pieuses prédications qu’il fit, tantôt à Valence et tantôt à la cour du roi, remirent dans le bon chemin, d’hommes errants que le libertinage en avait écartés ! Il déclamait librement contre le luxe et contre les vices des courtisans de son siècle, la plupart desquels se fondaient en toute sorte de mollesse et de délices. Et comme, par la force persuasive de ses paroles, il rappelait les uns dans le devoir, il y maintenait ceux qui n’en étaient pas sortis ! Mais à propos de son expérience, je ne saurais me taire en ce lieu de ce fameux colloque qui se tint à Poissy, {b} puisqu’on peut dire avec vérité que, dès que les choses commencèrent de s’y traiter à l’amiable, {c} il n’y eut pas un de tous les prélats de France qui parût là plus docte et plus avisé que lui : soit pour défendre le juste parti des catholiques, soit pour réfuter l’erreur des injustes suppôts de l’hérésie. »

    • Pages 248‑250, sur l’élection du duc d’Anjou à la Couronne de Pologne (mai 1573), puis son accession à celle de France, sous le nom de Henri iii, à la mort de son frère Charles ix (mai 1574) :

      « Lorsqu’après la mort de Sigismond, {d} roi de Pologne qui décéda sans enfants mâles, Henri, duc d’Anjou, frère de Charles ix, eut témoigné un grand désir de commander à ces peuples éloignés en la place de leur prince défunt, pour exécuter ce noble et hardi dessein, on jeta les yeux sur tous les habiles hommes du royaume, et l’on n’en jugea point de plus capable que ce grand de Montluc. Si bien qu’on le choisit, lui et le jeune de Lansac, {e} de qui la haute naissance et le courage invincible dans la guerre le rendaient extrêmement considérable, pour conduire cette haute entreprise, et pour gagner les suffrages de toute la Pologne en faveur de ce jeune prince. Certes, cette grande charge était d’autant plus difficile à exécuter qu’ils avaient en tête quatre illustres compétiteurs, puisque le roi de Suède, l’empereur, le prince de Transylvanie et le grand-duc de Moscovie {f} avaient de grandes prétentions sur cette couronne ; et que le voisinage de leurs royaumes, aussi bien que la conformité de vie et de mœurs qu’ils avaient avec ces peuples, les obligeaient, chacun pour soi-même et tous à l’envi, {g} d’employer leur crédit et leur autorité, leurs agents et leurs ambassadeurs, pour se faire élire roi de Pologne ; mais tout cela inutilement car, soit que ces deux rares hommes, de Lansac et de Montluc, travaillassent sous les heureux auspices de Charles ix, leur maître, soit que ce fût un trait du puissant génie du duc d’Anjou, son frère, ou un effet de leur propre suffisance et de leur adresse, ils confondirent l’espérance de ces quatre monarques et obtinrent pour ce jeune prince français le sceptre glorieux qu’il avait tant désiré. Mais, ô faveurs de la cour, que vous êtes inconstantes et passagères ! les froideurs, les dédains, voire même la haine presque mortelle de ce nouveau roi furent bientôt la récompense de ces justes et fidèles exécuteurs de ses volontés ; car, comme il était pourvu d’un esprit subtil et pénétrant, et peut-être un peu trop défiant et soupçonneux, venant depuis à considérer le choix que l’on avait fait de sa personne pour gouverner ce royaume éloigné, il s’alla tout incontinent imaginer que, sous prétexte de lui donner un empire, on avait eu dessein de lui en ravir un autre plus considérable ; puisqu’en l’éloignant de la cour, il semblait qu’on eût voulu l’exclure peu à peu de la succession de la Couronne de France, qu’il pouvait apparemment espérer et posséder un jour. {h} Notre de Montluc mourut quelques années après l’établissement de ce nouveau monarque ; et quoiqu’il fût parvenu jusques à une extrême vieillesse, si est-ce que {i} jusques à la fin de ses jours il ne laissa pas de travailler utilement pour le salut de la république. »


      1. Traduction française de Guillaume Colletet, Paris, 1644, v. note [13], lettre 88.

      2. En septembre 1561 (v. note [30], lettre 211).

      3. Avec douceur, aimablement.

      4. Sigismond ii avait régné sur la Pologne de 1548 et 1572.

      5. Guy de Saint-Gelais de Lansac (1544-1622).

      6. Ces quatre souverains concurrents étaient : le roi de Suède, Jean iii Vasa ; l’empereur germanique, Maximilien ii de Habsbourg (v. notule {g}, note [24] du Borboniana 5 manuscrit) ; le prince de Transylvanie (Hongrie), Istvan Bathory ; et le grand-duc de Moscovie, Ivan iv le Terrible.

      7. À qui mieux mieux.

      8. V. note [37] du Borboniana 4 manuscrit pour la fin pitoyable du court règne polonais d’Henri d’Anjou.

      9. Malgré tout.

        Montluc, né en1508, avait 66 ans quand Henri iii monta sur le trône de France ; il mourut cinq ans plus tard.


Ces deux références ne parlent pas des autres faits que le Borboniana relatait ici.

33.

« Voyez {a} le cardinal Duperron en son Traité de l’Eucharistie, page 1021, {b} et de Thou, tome 3, page 325. » {c}


  1. Ces deux références et les deux autres qui sont détaillées dans la note [34] infra ont été ajoutées dans la marge du manuscrit.

  2. Traité du Saint Sacrement de l’Eucharistie divisé en trois livres. Contenant la réfutation du livre du sieur du Plessis-Mornay contre la Messe, {i} et d’autres adversaires de l’Église, tant par la comparaison des sacrements de la nouvelle Loi avec ceux de l’ancienne, {ii} que par l’histoire de la créance universelle de ce Sacrement en toutes ses parties et par tous les siècles, selon les saints Pères de l’Église et autres auteurs, et par l’examen de toutes les liturgies, usage et pratique de l’Église touchant la Consécration, Transsubstantiation, Adoration, et autres cérémonies du Saint Sacrement de l’Autel. Par l’Illustrissime et Révérendissime cardinal Du Perron, {iii} archevêque de Sens, primat des Gaules et de Germanie, et grand aumônier de France. {iv}

    La page 1021 appartient aux additions du livre ii portant sur le Colloque de Poissy. {v} Y est résumée puis débattue une « confession proposée par quelques ministres en une conférence particulière et secrète, que la reine, pendant que les évêques et docteurs vaquaient à d’autres affaires, fit tenir, séparément et hors de l’assemblée générale », entre quelques docteurs catholiques et évêques, dont « Jean de Montluc, non évêque (car il ne fut jamais sacré évêque) mais nommé à l’évêché de Valence », {vi} et quelques ministres réformés, « pour essayer de tirer les ministres, sur le point de l’Eucharistie, à quelque confession de la réalité, afin de la rapporter puis après en l’assemblée générale, pour voir si les catholiques se pourraient contenter de les recevoir là-dessus à quelque espèce d’accord ».

    1. La Rochelle, 1598, v. note [19], lettre 81.

    2. Ancien et Nouveau Testament.

    3. Jacques Davy Duperron, v. note [20], lettre 146.

    4. Paris, Antoine Estienne, 1622, in‑fo de 1 024 pages, dédié au roi Louis xiii.

    5. V. seconde notule {b} de la note [32] supra.

    6. Mes italiques.

  3. Dans son Histoire universelle (livre xxv, règne de François ii, année 1560), Jacques-Auguste i de Thou a longuement relaté le discours prononcé par l’évêque de Valence, « prélat éloquent, et très estimé par sa longue expérience dans les affaires et par sa science des Lettres sacrées », lors d’une précédente assemblée de notables des deux religions, réunie au mois d’août à Fontainebleau (Thou fr, volume 3, pages 527‑530). Montluc y prêchait la fermeté contre la Réforme, qu’il accusait de servir de prétexte aux troubles qui commençaient à agiter le royaume, mais sans épargner les mœurs de la cour et du clergé catholiques :

    « Alors, adressant la parole aux deux reines, {i} il les supplia de faire cesser les chansons profanes et impudiques qu’on osait chanter tous les jours dans les maisons royales, et de substituer à ces infamies des psaumes français et de pieux cantiques ; exhortant Leurs Majestés à les chanter elles-mêmes en tout lieu et en tout temps ; que cela serait très agréable à Dieu, à qui nulle assemblée ne peut plaire que celle où il est honoré par un tribut de louanges.

    L’évêque de Valence dit encore que ceux-là n’avaient pas l’esprit de la véritable piété qui défendaient aux femmes les chants des Psaumes en langue vulgaire ; que si les traductions françaises avaient quelques erreurs, il les fallait condamner, et non pas tout l’ouvrage ; que les ennemis de l’Église prenaient occasion delà {ii} de calomnier les catholiques en disant qu’ils ne faisaient pas la guerre aux hommes, mais à Dieu, lorsqu’ils défendaient, {iii} en public et en particulier, une psalmodie instituée pour glorifier le Seigneur et pour consoler les âmes pieuses. » {iv}

    1. La reine mère, Catherine de Médicis, et la reine régnante, Marie Stuart, épouse de François ii (mort le 5 décembre suivant).

    2. Ensuite.

    3. Prohibaient.

    4. V. infra note [34] pour une autre relation de cette assemblée de Fontainebleau, par François Beaucaire de Péguillon.

Jean i de Montluc avait épousé secrètement une certaine Anne Martin (patronyme plutôt picard que grec) et eu d’elle un fils, Jean ii (né vers 1545, légitimé en 1567), qui devint prince de Cambrai, puis maréchal de Balagny en 1594 (v. notule {a}, note [55] du Borboniana 1 manuscrit).

Balagny est une seigneurie de Picardie que Jean i de Montluc acquit vers 1560. Elle correspond aujourd’hui à la commune de Balagny-sur-Thérain (Oise).

34.

« Claude Robert dans la Gallia Christiana, page 501, {a} < et > Fr. Belcarius, page 941. » {b}


  1. La page 501 de la Gallia Christiana [France chrétienne] de Claude Robert {i} appartient à la description du diocèse de Valence avec ce paragraphe sur Jean de Montluc (numéroté 68 dans la liste chronologique des évêques de ce diocèse). Avec quelques inexactitudes, il enrichit ce qui a été dit précédemment : {ii}

    Edidit reformationem Cleri Valentinensis, et Diensis, Parisiis, apud Vascosanum 1558. ad Carolum cardinalem Lotharingum. Ei dicat Commentarium de Pactis Iacobus Cuiacius 1559. Interfuit Colloquio Pisciaci 1561. de quo Colloquio agens Illustrissimus cardinalis Perronius lib. 3 de Eucharistia contra Plessæum pag. 1021. ait ipsum Ioannem fuisse quidem nominatum, sed nunquam consecratum Præsulem. Fuit autem Legatus Caroli 9. ad Senatum Poloniæ pro electione Henrici Andium Ducis in regem 1573. Obiit 1579. sepultus in Ecclesia Cadomensi in Vasconia, cum Blasio fratre Mareschallo Franciæ. Eum vero sic Petrus Ronsardus alloquitur :

    Docte Prélat, qui porte sur la face
    Phœbus poutrait, et Pallas au cerveau.

    Ad eum quoque extat præfatio Mureti in libros Oratorios Ciceronis ; cum esset Orator Regius apud Venetos. Legendus Franciscus Belcarius l. 28 n. 63.

    [Il a publié la Cleri Valentini et Dyensis reformatio (Paris, Vascosanus, 1558), {iii} qu’il a dédiée au cardinal Charles de Lorraine. Jacques Cujas lui a dédié son Commentarium de Pactis en 1559. {iv} Il a participé au Colloque de Poissy en 1561, sur lequel, attaquant du Plessis-Mornay, l’illustrissime cardinal Duperron (livre iii de l’Eucharistie, page 1021) dit que notre Jean a certes été nommé évêque, mais jamais consacré. {v} En 1573, il fut aussi ambassadeur de Charles ix auprès de l’Assemblée polonaise pour l’élection de Henri, duc d’Anjou, à la royauté. {vi} Il mourut en 1579 et fut enterré dans l’église de Caen en Gascogne, {vii} auprès de son frère Blaise, maréchal de France. Pierre Ronsard parle de lui avec vérité en ces vers :

    « Docte prélat, qui porte sur la face
    Phœbus potrait, et Pallas au cerveau. » {viii}

    Dans sa préface aux Livres oratoires de Cicéron, Muret le loue aussi, quand il était ambassadeur du roi à Venise. {ix} Il faut lire Franciscus Belcarius, livre xxviii n. 63]. {x}

    1. Première édition (Paris, 1626), v. note [51] du Borboniana 5 manuscrit.

    2. V. notes [31][33] supra.

    3. Cleri Valentini et Dyensis reformatio restitutioque ex sacris Patrum conciliis excerpta per R.D. Joannem Monlucium earum Diœcesium Episcopum [Réforme et rétablissement du clergé de Valence et du Dauphiné, tirés des saints conciles des Pères par le Révérend Père Jean de Montluc, évêque de leurs diocèses] (Paris, Michael Vascosanus, 1558, in‑8o de 206 pages), dédié au cardinal Charles de Lorraine (v. premi-re notule {j}note [21] du Borboniana 5 manuscrit).

    4. Les Iacobi Cuiacii Iurisconsulti Commentarii… [Commentaires de Jacques Cujas, jurisconsulte…] sur le Digeste justinien (Lyon, Ioannes Tornæsius, 1559, in‑fo de 426 pages) sont dédiés à Arnaud Du Ferrier, président au Parlement de Paris (v. supra note [32]). Leur seconde partie (pages 320‑426), sur 11 titres des Pandectes, dont les deux derniers traitent de pactis et transactionibus [sur les contrats et transactions], est néanmoins dédiée Ad amplissimum virum D. Ioannem Monlucium Episcopum et Comitem Valentinum Diensem [Au très éminent Monseigneur Jean de Montluc, évêque-comte de Valence en Dauphiné].

    5. V. la première citation (notule {a}) de la note [33] supra (qui n’est pas extraite du livre iii de Duperron, mais de ses additions au livre ii).

    6. V. la seconde citation (Sainte-Marthe) de la note [32] supra.

    7. Cadomum est le nom latin de Caen en Normandie et Vasconia, celui de la Gascogne. Cette localisation est incompréhensible : Montluc a été inhumé dans la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse, qui est une ville du Languedoc et non de Gascogne ; la cathédrale de Caen est aussi dédiée à saint Étienne.

    8. Pour dire le beau visage d’Apollon et le génie de Pallas, déesse de la sagesse et des arts. La suite de l’élogieux sonnet de Ronsard n’a pas d’autre intérêt que littéraire (sans inspirer d’extase poétique).

    9. Surprenante confusion entre Marc-Antoine Muret (Muretus, v. note [31], lettre 97) et Paolo Manuzio : v. supra note [31].

    10. V. ci-dessous.

  2. Rerum Gallicarum commentarii ab anno Christi mcccclxi ad annum mdlxxx. Accessit ex occasione, variis locis, Italicæ, Germaniæ, Hispanicæ, Hungaricæ, et Turcicæ Historiæ tractatio. Opus posthumum auctore Francisco Belcario Peguilione Metensi Episcopo, generis claritate, humanarum sacrarumque literarum cognitione, rebusque tum Gallia, tum in Concilio Tridentino præclare gestis illustri ; ut ex proximis ad lectorem præfationubus constabit, et ex eiusdem oratione de Druidensi victoria ad Patres Concilii. Ad Ludovicum xiii. Francorum et Navarræ Regem Christianissimum.

    [Commentaires des affaires de France depuis l’année 1461 jusqu’à l’année 1580. Il y est en outre traité, à l’occasion, de l’histoire italienne, allemande, espagnole, hongroise et turque. Ouvrage posthume de François Beaucaire de Péguillon, évêque de Metz, {i} illustre pour l’éclat de sa famille, pour sa connaissance des lettres profanes et sacrées, et pour ce qu’il a brillamment accompli tant en France qu’au concile de Trente, ainsi qu’on le constatera dans ses préfaces au lecteur et dans son discours sur la Victoire des druides {ii} adressé aux pères du concile. Dédié à Louis xiii, roi très-chrétien de France et de Navarre] {iii}

    La page 941 appartient au vingt-huitième des trente livres qui composent l’ouvrage et porte sur l’année 1560, avec ce paragraphe intitulé Castilio Amyralius Calvinianorum querimonias apud Regem prosequitur [L’amiral de Châtillon accompagne les plaintes des calvinistes auprès du roi], qui relate l’assemblée des notables du royaume tenue à Fontainebleau du 21 au 26 août :

    Decimo easdem Kal. quum eadem hora, qua prius, hoc est, prima pomeridiana, ut Galli numeramus, apud Regina Regis matrem coiissent, et Rex Valentino Episcopo postremo consiliario, ut sententiam diceret, iinxiset, surrexit Castilio Amyralius, et Calvinianorum nomine duos libellos Regi obtulit, quibus se de Ambasiana conspiratione, et cæteris seditionibus purgare conabantur : et ut supplicia religionis ergo usque ad universi Christianismi Concilium remitteret, postremo ad facienda suæ persuasionis sacra, concionesque habendas templa illis attribueret, postulabant. Quum in Normaniam ad præparandam militibus in Scotiam navigaturis classem profectus essset, et mandatum a Regina Regis matre accepisset, ut Calvinianorum querimonias audiret, in id incubuisse et hos libellos reportasse : qui satis æqua ratione niti videntur, Regem obsecrare, ut quod hic egerit, æqui bonique consulat. Libelli Albaspineo Regio scribæ traditi sunt, quos alta voce, ut ab omnibus audierentur, legeret. Ubi lecti fuerunt, Valentino Episcopo iterum Rex iniunxit, ut sententiam diceret. Tria capita (inquit) Regia Majestas nobis proposuit, de religione, de Regio ærario, de ratione, qua populi ei obnoxii ad voluntariam eius observantiam, obsequiumque adducantur : quibus ut satisfiat, non in humani ingenii prudentia, sed in sola Dei bonitate positum arbitror, qui nunquam malum aliquod importari sinit, cui non simul præsens remedium porrigat. Tum Diocletiani Imperatoris dictum adduxit, principum miseram conditionem esse, quos sæpenumero hi maxime fallunt, quibus plurimam fidem adhibent : id illi non accidisse, qui matris prudentia, et Guisanorum diligentia seditionem Ambasianam deprehenderit, eique mature providerit : deinde in Episcoporum, curionum, cæterorumque virorum sacratorum impuros mores, negligentiam, ignorantiam invectus, illud Esaiæ regni Iudaici ruinam præcidentis citavit : contra Calvinianorum ministrorum modestiam, diligentiam, eruditionem opposuit : ut non mirum sit, si istorum doctrina tam multis libris, quam frequentibus concionibus hominum mentibus instillata plures temporis successu ad se pellerexit : deinde ad Reginas, matronasque et puellas aulicas conversus, ut Psalmos Davidis, atque alios tam in templis quam extra templa decantent, hortatus est ; corrigendam Episcoporum, curionumque negligentiam, et antiquos mores instaurandos, quæ prima seditionum compescendarum ratio est : altera ut Concilium totius Christianismi celebretur : aut si id impetrari non potest, saltem Galliæ totius Episcopi suum celebrent ; qualia sub Carolo Magno, Ludovicoque eius filio celebrata sunt ; ad quod Concilium etiam ex Calvinianis eruditiores admittantur, ut si qua via consentire nobiscum possint, periculum fiat. Nec illa objectio recipienda est qua dogmata, quæ nunc controversuntur, antiquis Conciliis vel approbata, vel damnata asserunt : Theodosius enim Imperator Arrianos, Macedonianosque, atque eorum placita Constantinopolitano Concilio expendi, ad damnari iussit, quamvis Niceno, atque aliis Conciliis antea damnati fuissent.

    [On se réunit chez la reine mère le dixième jour précédant les mêmes calendes, {iv} à la même heure, c’est-à-dire la première après midi, comme nous les comptons en France. Quand le roi commanda à son dernier conseiller, l’évêque de Valence, de donner son avis, l’amiral de Châtillon se leva {v} et, au nom des calvinistes, présenta deux requêtes au roi : la première visait à se justifier de la conjuration d’Amboise {vi} et d’autres séditions, et par conséquent, à reporter les châtiments de la Religion jusqu’à la tenue d’états généraux réunissant tous les chrétiens ; la seconde réclamait qu’on leur permît de célébrer les offices de leur culte et de prêcher dans leurs temples. Quand, en Normandie, notre flotte armée s’apprêtait à partir pour l’Écosse, {vii} la reine mère était convenue d’entendre les plaintes des calvinistes et leur avait demandé de coucher leurs requêtes sur le papier et de les lui remettre. Il leur semblait maintenant raisonnable de supplier le roi d’examiner ce dont il s’agissait. Les requêtes furent alors remises au secrétaire d’État L’Aubespine, {viii} qui les lut à haute voix afin que tous les entendissent. Cela fait, le roi demanda de nouveau à l’évêque de Valence de dire son avis. « Sa royale Majesté, dit-il, nous a soumis trois points capitaux, touchant à la religion, aux finances de l’État, et à la raison pour laquelle les peuples qui lui sont soumis sont menés à la volonté de le respecter et de lui obéir. Pour y satisfaire, je pense qu’il ne faut pas s’en remettre à la sagesse de l’esprit humain, mais à la seule bienveillance de Dieu, lequel ne permet jamais de provoquer un mal contre lequel n’existerait aucun remède efficace. » Il cita alors les paroles de l’empereur Dioclétien, disant que le sort des princes est malheureux, en ce qu’ils sont très souvent profondément trompés par ceux qui professent diverses religions : {ix} cela n’est pas arrivé à celui dont la prudence de sa mère et la diligence des Guise ont surpris la conjuration d’Amboise {v} et y ont promptement pourvu. Ensuite, transporté contre les mœurs impures, la négligence et l’ignorance des évêques, des cardinaux et d’autres ecclésiastiques, il a cité le passage d’Isaïe coupant court à la ruine du royaume de Judas, {x} et leur a opposé la modestie, la diligence et la science des ministres calvinistes : si bien qu’il n’y a pas à s’étonner que leur doctrine, que tant de livres et tant de prêches ont instillée dans les esprits, ait, au fil du temps, attiré quantité de gens à elle. Et puis il s’est tourné vers les reines, les dames et les demoiselles de la cour, et les a exhortées à réciter les Psaumes de David et autres cantiques, dans les églises comme ailleurs. « Il faut corriger la négligence des évêques et des cardinaux et rétablir les anciennes mœurs, car telle est la première manière d’apaiser les séditions ; {xi} une autre est que se réunissent des états généraux de tous les chrétiens ou, si c’est impossible, que les évêques de toute la France tiennent leur assemblée, comme firent jadis Charles le Grand et son fils Louis. » {xii} Les plus réfléchis des calvinistes ont même adhéré à cette initiative, pour essayer de voir s’il était possible de s’entendre avec nous. On n’a pas retenu l’objection selon laquelle les dogmes aujourd’hui controversés auraient été approuvés ou condamnés par les anciens conciles : de fait, au concile de Constantinople, l’empereur Théodose a ordonné que soient punis et condamnés les ariens et les macédoniens, bien qu’ils l’aient préalablement été à Nicée et par d’autres conciles]. {xiii}

    1. François Beaucaire de Péguillon (Audes, Bourbonnais 1514-La Creste, Auvergne 1591), évêque de Metz en 1555.

    2. Allégorie des Français luttant contre l’hérésie protestante.

    3. Lyon, Claude Landry, 1625, in‑4o de 1 026 pages.

    4. Les calendes citées à la page 940 étant celles de septembre (c’est-à-dire le 1er septembre), le 10e jour qui les précède correspond au 23 août (1560).

    5. La reine mère était Catherine de Médicis et le roi, son fils François ii ; l’amiral de Châtillon était Gaspard ii de Coligny, meneur du parti protestant (v. note [156], lettre 166).

    6. Événement déclenchant des guerres de Religion, survenu en mars 1560 : v. note [13], lettre 113.

    7. Marie de Guise était la mère de Marie Stuart, alors reine de France, comme épouse de François ii ; elle assurait la régence de l’Écosse depuis la mort, en 1554, de son mari, le roi Jacques v. Soutenu par les Anglais, un parti de nobles écossais s’était révolté contre sa Couronne et la France était venue à son secours en envoyant des troupes par mer, en avril 1560. Cette expédition s’était soldée par un échec militaire et diplomatique ; Marie de Guise était morte le 11 juin ; le traité d’Édimbourg, conclu le 6 juillet, avait mis fin à l’alliance franco-écossaise et institué le protestantisme en Écosse, comme religion d’État.

      Dès ces premières phrases, le latin de Beaucaire de Péguillon s’est avéré exécrable : malgré la difficulté de l’exercice, j’ai fait de mon mieux pour en donner une traduction intelligible.

    8. Sébastien de L’Aubespine (1518-1582), évêque de Limoges en 1558.

    9. Référence inexacte, ces propos sont ceux de l’empereur Domitien (v. note [8], lettre 851), dans sa Vie écrite par Suétone (chapitre xxi, § 1) :

      Conditionem principum miserrimam aiebat, quibus de coniuratione comperta non crederetur nisi occisis ;

      [Le sort des princes, disait-il, est extrêmement malheureux, en ce qu’on ne croit pas en la réalité d’une conspiration tant qu’ils n’ont pas été tués].

    10. Le chapitre 3 d’Isaïe fustige l’anarchie et l’impiété qui sévissaient à Jérusalem et menaçaient de ruiner le royaume.

    11. Relation conforme à celle de Jacques-Auguste i de Thou, rapportée dans la notule {c} de la note [33] supra.

    12. États généraux assemblés par Charles vii, en 1439 et 1448, puis par son fils Louis xi, en 1468.

    13. Le concile de Constantinople, réuni en 381 par l’empereur Théodose ier (v. note [3] de l’Observation i de Guy Patin et Charles Guillemeau), avait confirmé la condamnation des hérésies prononcée par le concile de Nicée (en 318), notamment celles des ariens, qui niaient la divinité du Christ (v. note [15], lettre 300), et des macédoniens (sectateurs de l’évêque Macedonius), qui niaient la divinité du Saint-Esprit. Il n’était donc pas inutile ou impie de réexaminer les décisions de précédents conciles.

  3. Ces deux références ont été ajoutées dans la marge du manuscrit à la suite de celles qui ont été détaillées dans la note [33] supra.


35.

Blaise de Montluc a en effet parlé de ce Compain dans le livre v, tome second, pages 4 vo‑5 ro, de ses Commentaires, {a} quand le roi Henri iii de Navarre (futur Henri iv de France) l’envoya apaiser de graves émeutes survenues, en novembre 1562, entre les catholiques et les protestants de Cahors. Le style et le contenu de son récit méritent bien d’enfler un peu ma citation :

« À la fin, ils se résolurent de m’envoyer en Guyenne avec patentes {b} et permission de lever gens à pied et à cheval pour courir sus aux uns et aux autres qui prendraient les armes. Je rejetai tant que je pus cette charge, connaissant bien que ce n’était pas œuvre achevée, mais œuvre qui s’allait commencer, et qu’il faudrait bien un bon maître pour y donner ordre ; et demeurai pour ce coup-là constant à ne la prendre point. Le lendemain matin, la reine {c} et le roi de Navarre m’envoyèrent quérir, et commanda la reine à M. de Valence, mon frère, de me convertir {d} à prendre cette charge. Et comme je fus devant eux, après plusieurs remontrances qu’ils me firent, je fus contraint de l’accepter, pourvu que M. de Burie {e} fût compris en la commission, < car > je voulais qu’il eût part au gâteau. {f} La reine ne le voulait jamais, ne disant que trop de choses. Tout leur est permis, mais je lui dis que si elle ne l’y comprenait, que, lui étant lieutenant de roi comme il était, qu’il me donnerait toutes les traverses qu’il pourrait par-dessous main, pour me garder que je ne fisse rien qui valût ; ce qu’à la fin ils trouvèrent bon. Et la même charge qu’ils me baillèrent, ils en baillèrent autant à M. de Cursol {g} pour la province de Languedoc ; et nous commandèrent à tous deux que celui qui aurait fait {h} le premier allât secourir son compagnon s’il en était besoin. M. de Cursol n’était non plus que moi de cette religion nouvelle ; et crois qu’il s’en fit plutôt pour quelque malcontentement que par dévotion, car il n’était pas grand théologien, non plus que moi ; mais j’en ai vu plusieurs par dépit se faire de cette religion, et après il leur tombait dessus {i} et s’en sont bien repentis. Nous prîmes congé de la reine et du roi de Navarre tous deux ensemble, et allâmes à Paris, et M. de Valence avec nous. Je demandai deux conseillers de ce pays-là de France pour faire les procès, me craignant {j} que ceux du pays ne feraient rien qui vaille, à cause que les uns voudraient soutenir les catholiques, et les autres, les huguenots. Et me fu<ren>t baillé<s> les deux plus méchants hommes du royaume de France, qui étai<en>t un Compain, {k} conseiller du Grand Conseil, et un Gérard, lieutenant du prévôt d’Hôtel, {l} qui depuis n’ont pas acquis meilleure réputation qu’ils avaient auparavant. Je me repentis d’en avoir demandé, mais je pensais bien faire. Ainsi je m’en vins en Gascogne en diligence. »


  1. Bordeaux, 1593, v. note [28], lettre 203.

  2. Lettres patentes (v. note [7], lettre 496), soit un ordre écrit de mission.

  3. Margerite de Valois, sœur du roi Charles ix, première épouse de Henri iii, roi de Navarre.

  4. Convaincre.

  5. Charles de Coucy (1491-1565), seigneur de Burie, lieutenant du roi de Navarre en Guyenne

  6. « Avoir part au gâteau, pour dire avoir part dans une affaire » (Furetière).

  7. Probablement Jacques de Cursol, futur duc d’Uzès.

  8. Qui aurait achevé sa mission de pacification.

  9. On le leur reprochait.

  10. Méfiant.

  11. Nicolas Compain, sieur de Villette et de Fresnay, conseiller au Grand Conseil, puis chancelier de Navarre, était fils d’un notaire et avocat au parlement de Toulouse. Proche des réformés, il fut condamné à mort par contumace en 1562 et mourut en 1572.

    Montluc ne tarda pas à blâmer la sévérité extrême de la justice que Compain voulait rendre et se fâcha contre lui, comme il l’a raconté à la page 158 vo de ses Commentaires.

  12. Jacques-Auguste i de Thou, dans le livre xxxii de son Histoire universelle, donne à ce Gérard (que Montluc appelle plus loin Girard) le nom de Pierre Girard.

36.

La date de cet article (1638) a été ajoutée dans la marge du manuscrit.

37.

« Lorsque les Sabins {a} eurent enfermé le vieux Janus, {b} ce fut partout le signe d’une paix florissante : il n’y a aucun salut dans la guerre, le monde entier réclame la paix. Et nous, avons-nous enfermé un vigoureux Janus ? Qu’en adviendra-t-il ? » {c}


  1. Ancien peuple d’Italie centrale.

  2. Premier roi mythique d’Italie, Janus était (Fr. Noël) :

    « fils d’Apollon et de Créuse. Saturne, {i} chassé du ciel, ayant abordé en Italie, Janus l’accueillit, et l’associa même à sa royauté. Le dieu, par reconnaissance, dota Janus d’une rare prudence, qui rendait le passé et l’avenir toujours présents à ses yeux, ce qu’on croit exprimé par les deux visages adossés. Le règne de Janus fut pacifique, ce qui le fit regarder comme le dieu de la paix. Numa lui éleva un temple, ouvert durant la guerre, et fermé en temps de paix. On le représente tenant d’une main une clef, et de l’autre, une verge, pour marquer qu’il est le gardien des portes et qu’il préside aux chemins. Quelques-uns prétendent que Janus est le soleil, et qu’il est représenté double, comme le maître de l’une et l’autre porte du ciel, parce qu’il ouvre et ferme le ciel. Ses statues marquent souvent de la main droite le nombre 300, et de la gauche, celui de 65, pour exprimer la mesure de l’année. » {ii}

    1. Dans le mythe, la ravissante Créuse, fille d’Érechthée, roi d’Athènes, fut séduite par Apollon (v. note [8], lettre 997). V. note [31] des Deux Vies latines de Jean Héroard pour Saturne.

    2. Le mois de janvier doit ainsi son nom au souvenir de Janus.
  3. Le mythe donne leur sens allégorique aux vers de Nicolas Bourbon : le viridis Ianus y était Jean de Vert (Johann von Werth, v. note [5], lettre 38), capturé par le duc Bernard de Saxe-Weimar (v. note [7], lettre 27) lors de la bataille de Rhinfeld (2 mars 1638, v. note [21], lettre 39).

    Guy Patin a cité ce quatrain, sans nommer son auteur, dans sa lettre du 10 mars 1638 à Claude ii Belin (v. sa note [7]).


Hieronymus von Colloredo-Waldsee (1582-16 juillet 1638), comte et valeureux général impérial de la guerre de Trente Ans, avait participé à de nombreuses batailles. Allié aux Lorrains, il fut vaincu et capturé par le marquis de La Force (v. note [15], lettre 226), à la tête des troupes françaises, lors de la bataille de Raon (qui eut lieu près de Raon-l’Étape, dans les Vosges, le 17 mars 1636). Emprisonné au château de Vincennes, il mourut peu après sa libération, le lendemain de la levée du siège de Saint-Omer par les Français (v. note [2], lettre 40).

38.

« “ Sobrement vivre, et non follement croire.

Ne vois, ne crois, a Épicharme {a} écrit,
Ce sont les nerfs et membres de l’esprit… ”

Voyez l’Emblème 16 d’Alciat. » {b}


  1. V. note [4], lettre 324, pour Épicharme et pour la citation de son adage par Quintus Cicéron.

  2. V. note [19], lettre 229, pour André Alciat et ses célèbres Emblèmes. Celui-ci figure à la page 22 de l’édition latine (Lyon, 1551), avec un titre un peu différent, mais de même sens (Sobrie vivendum, et non temere credendum), et à la page 37 de l’édition française (Lyon, 1549). Il est illustré par une gravure montrant, dans un paysage rupestre, une main ouverte, avec un œil au centre de la paume. En voici le texte complet, qui ouvre à une amusante interprétation médicale :

    Ne credas ne (Epicharmus ait) non sobrius esto,
    Hi nervi, humanæ membraque mentis erunt :
    Ecce oculata manus credens id quod videt. Ecce
    Pulegium, antiquæ sobrietatis olus,
    Quo turbam ostendo sedaverit Heraclitus,
    Mulxerit et tumida seditione gravem
    .

    « Ne vois, ne crois, a Épicharme écrit,
    Ce sont les nerfs et membres de l’esprit.
    L’œil en main croit la chose qu’il voit sienne,
    Poulieu, herbe est de Sobresse ancienne, {i}
    Lequel montré (quand sa force exposa)
    Sédition Héraclite apaisa » {ii}

    1. Le poliot ou poulieu est une plante médicinale aromatique appartenant au genre des menthes. La sobresse est la sobriété.

    2. La traduction française est assortie de ce commentaire :

      « Ne trop boire, ne trop croire font l’homme sage. L’œil en la main est certitude des choses vues et touchées. Poulieu est herbe gardant de soif et d’ivrognerie. »

      V. note [8], lettre latine 326, pour Héraclite, le philosophe misanthrope d’Éphèse. Une traduction littérale et prosaïque des deux derniers vers permet de mieux comprendre ce qu’il vient y faire :

      « En le prenant, Héraclite apaisa un grave désordre : il a extrait sa dissension œdémateuse. ».

      Cela veut dire qu’Héraclite (au rapport de Diogène Laërce, livre ix, § 4, page 1049) était atteint d’hydropisie (dissension œdémateuse, v. note [12], lettre 8) et l’a extraite (évacuée) grâce au poulieu, ce qui donne une preuve tangible de ses vertus diurétiques.

      En qualifiant le poulieu d’antiquæ sobrietatis olus, « herbe de l’antique sobriété », Alciat faisait allusion au lien établi entre l’alcoolisme et les œdèmes diffus (anasarque, v. note [19], lettre 307) qui caractérisent la cirrhose évoluée (v. note [19], lettre 436).

39.

« Est insensé celui qui, ayant tué le père, permet à ses enfants de vivre » : v. note [29], lettre 86, pour cet adage antique, qu’Érasme a attribué à Aristote.

Après avoir exprimé ses doutes sur la véracité de la nouvelle annonçant la capture de Johann de Vert (désigné par « il »), tant espérée par les Français, Nicolas Bourbon trouvait imprudent d’avoir la clémence de l’emprisonner au château de Vincennes avec Hieronymus von Colloredo, plutôt que d’exécuter ces deux généraux impériaux.

40.

« plus que de raison au service des intérêts de Philippe ii. […] religieux pour le roi. »

V. notes :

41.

V. note [1], lettre 873, pour l’habit tanné (châtain), devenu plus tard noir, des jésuites, tenu par une agrafe (v. note [6], lettre latine 83).

42.

« Ô roi Philippe, tu ne me surpasses que parce que je meurs le premier ! »

Jacques-Auguste i de Thou a terminé sa longue biographie critique de Sixte Quint (Histoire universelle, livre c, règne de Henri iv, année 1590, Thou fr, volume 11 pages 263‑274) par ce paragraphe (pages 273‑274) :

« Les Espagnols animèrent contre lui quelques prédicateurs {a} qui, oubliant leur devoir et le respect dû à l’autorité suprême du souverain pontife, négligèrent d’annoncer la parole de Dieu pour parler de l’état où se trouvait la France {b} et répandre de faux bruits. Leur séditieuse éloquence n’avait que cet objet, et ils osaient taxer indistinctement le pape de nonchalance et d’avarice, pour exciter peu à peu la haine du peuple contre lui. Le feu commençait à s’étendre, et cette cabale allait devenir plus puissante lorsque Sixte crut devoir s’opposer à ce funeste progrès. Ainsi, par les ordres du pape, le cardinal Jérôme Rustocucci, vicaire général et juge ordinaire de la Cour de Rome, fit un décret, le 17e de juin, {c} portant défenses aux prédicateurs, sous peine d’interdiction, de traiter dans leurs sermons d’autres sujets que ceux qui regardaient l’instruction des fidèles et de religion. Cette nouvelle loi décernait encore des peines afflictives {d} contre ceux qui, comme il arrivait fort souvent, disputaient dans des assemblées particulières sur les fausses nouvelles qu’on répandait dans Rome, et y excitaient de vives querelles. » {e}


  1. Sans doute surtout jésuites.

  2. Les péripéties de la Ligue catholique soutenue par les Espagnols et par Rome.

  3. Sixte Quint mourut le 27 août 1590.

  4. Des châtiments corporels.

  5. Addition (pages 794‑795 du même volume) :

    « Les Espagnols ne se contentèrent pas de décrier la conduite de ce pape tandis qu’il vivait, et d’avoir mis en œuvre les protestations les plus injurieuses de son autorité, pour l’engager à envoyer des secours aux ligueurs de France, dans la vue d’épuiser ces trésors qu’ils appréhendaient que Sixte n’employât à leur faire la guerre. Ils portèrent contre lui leur vengeance jusque même après sa mort, et ils n’oublièrent rien pour rendre sa mémoire abominable par les libelles diffamatoires qu’ils répandirent contre lui de toutes parts. J’en ai vu moi-même quelques exemplaires. Sixte, disent-ils, qui par le moyen de la magie était depuis longtemps en commerce avec le démon, avait fait pacte avec cet ennemi du genre humain de se donner à lui à condition qu’il le ferait pape, et qu’il lui donnerait six ans de règne. En effet, Sixte fut élevé sur la chaire de saint Pierre et, pendant cinq années qu’il gouverna dans Rome, il signala son pontificat par des actions qui surpassent la faible portée de l’esprit humain. Enfin, au bout de ce terme, ce pape tomba malade ; et dans cet état, le démon s’étant apparu à lui pour le sommer de sa parole, Sixte s’emporta fort contre la mauvaise foi de l’ambassadeur d’enfer, lui reprochant que le terme dont ils étaient convenus n’était pas échu, et qu’il s’en manquait encore un an. Mais le démon le fit souvenir qu’au commencement de son pontificat, ayant condamné un jeune homme contre les lois, parce qu’il avait un an de moins qu’il ne fallait pour pouvoir être fait mourir, {i} il l’avait cependant fait exécuter, en disant qu’il lui donnait un des siens ; que cette année jointe aux cinq autres qu’il avait régné faisaient les six ans complets qu’il lui avait promis ; et que, par conséquent, il avait tort de se plaindre qu’il vînt le sommer de sa parole avant le terme. Sur quoi, Sixte confus, et qui n’avait rien à répondre, demeura muet ; et s’étant tourné vers la ruelle de son lit, {ii} se prépara à la mort au milieu des agitations terribles que lui causaient les remords de sa conscience. Au reste, je ne donne ce trait que comme un bruit répandu par les Espagnols, et je serais très fâché d’en garantir l’authenticité. »

    1. Troile Savelli, v. note [14] du Naudæana 2.

    2. V. note [4] du Faux Patiniana II‑4.

43.

Phrase ajoutée dans la marge du manuscrit.

V. note [36] du Borboniana 8 manuscrit pour l’écrivain Raoul Boutrays, avocat au Grand Conseil.

Bertrand i Soly (Solly), conseiller au Parlement de Paris, puis président aux enquêtes, mort en 1612, eut un fils prénommé Jean, conseiller au Parlement, mort en 1604, âgé de 27 ans, après avoir épousé une dénommée Anne Le Gruel (Popoff, no 2298). Il s’agissait donc d’un autre fils du président Soly, dont j’ai trouvé la trace ailleurs.

Frédéric Lachèvre, dans ses Mélanges sur le libertinage au xviie siècle (Paris, Édouard Champion, 1920, in‑8o) parle en effet (pages 216‑219) du remariage (ce qu’on appelait alors « respouser », verbe aujourd’hui remplacé par « se remarier ») d’une dame nommée Hélène Boutrays, veuve (mais non divorcée ou démariée) de Bertrand [ii] Soly, sieur de Vilginis, conseiller et maître d’hôtel du roi, avec François Pajot, conseiller du roi en son Grand Conseil. Cette déclaration s’appuie sur la transcription intégrale du contrat de mariage insinué (enregistré) le 7 février 1637, en citant, parmi les témoins, Marie Bouthrais (sic), sœur d’Hélène et épouse d’un nommé Augustin Algrain de Cayeur.

Louis Dolé (ou Dollé), seigneur du Vivier, avocat, d’abord procureur général de la reine Marie de Médicis, puis conseiller d’État du roi en ses conseils d’État et privé, et intendant des finances, était une créature (un affidé) du maréchal d’Ancre (Concino Concini, v. note [8], lettre 890), assassiné sur l’ordre de Louis xiii en 1617 (soit l’année suivant la mort de Dolé).

Deux autres insinuations du Châtelet de Paris, conservées aux Archives nationales corroborent le récit du Borboniana :

Ces pièces confirment donc tous les dires du Borboniana, à l’exception du démariage (divorce) d’Hélène Boutrays et de Bertrand ii Soly, pour cause d’impuissance virile, probablement constatée par un humiliant congrès (v. note [6], lettre 3), dont les actes notariés ne conservaient guère le fâcheux souvenir.

44.

V. note [36] du Borboniana 6 manuscrit pour Achille i de Harlay, premier président du Parlement de Paris de 1582 à 1616. Son fils unique, Christophe ii de Harlay, comte de Beaumont, mena une carrière militaire et diplomatique, et mourut en 1615 ; v. note [19], lettre 469, pour son fils aîné, Achille ii de Harlay.

45.

« On dit que la théologie est l’art de douter parce que ses principes ne peuvent être prouvés par l’intelligence, elle appartient aux principes, c’est la science des conséquences. »

Au xive s., a été établie la distinction scolastique entre (1) théologie spéculative surnaturelle, qui ne peut être démontrée, fondée sur les principes (« Dieu est trois et un à la fois »), et (2) théologie pratique ou naturelle, qui peut être démontrée, fondée sur les conséquences (par exemple, « Tu serviras Dieu, ton Seigneur, de toute ton âme »).

V. supra note [17], pour l’attribution d’un propos similaire à Jean Tournier (ou à un de ses homonymes).

46.

Maître Nicolas Rouguenaut, curé et vicaire perpétuel de l’église Saint-Benoît à Paris (v. note [2], lettre 981), est cité dans un arrêt du Parlement daté du 9 avril 1633, transcrit à la page 55 du livre de l’abbé Jean Gaston intitulé Une Paroisse parisienne avant la Révolution, Saint-Hyppolite (Paris, Librairie des Saints-Pères, 1908, in‑4o). Je n’ai rien trouvé pour confirmer son décanat de la Faculté de théologie (Sorbonne).

V. notes [22] et [23] de la lettre de Guy Patin à Charles Spon, datée du 8 juillet 1650, pour :

47.

Antoine Du Prat (ou Duprat, Issoire en Auvergne 1463-1535) a cumulé les plus hautes fonctions dans la magistrature puis dans la prélature. président au mortier (1506), puis premier président (1507) du Parlement de Paris, il fut nommé chancelier de France le 7 janvier 1515 à l’avènement de François ier au moment de son avènement, et il conserva cette charge jusqu’à sa mort. Veuf en 1507, il fut ordonné prêtre en 1517 et devint administrateur des évêchés de Valence (1522), d’Albi (1528) et de Meaux (1535), tout en étant archevêque titulaire de Sens (nommé en 1522). Il fut reçu cardinal en 1527 et mourut huit ans plus tard dans son château de Nantouillet, en Île-de-France (Seine-et-Marne), entre Meaux et Roissy-en-France. Ses actions politiques et diplomatiques ont grandement contribué à la gloire du règne de François ier et à l’épanouissement de la Renaissance française.

Dans les Éphémérides politiques, littéraires et religieuses de François-Joseph-Michel et Joseph Planche, {a} l’article sur Duprat (sans citer sa source) commence par expliquer sa faveur auprès du roi (juillet-août 1635 [sic pour 1535], pages 73‑74) :

« Dans le temps que François ier n’était encore que duc d’Angoulême, Duprat, qui était son gouverneur, s’aperçut qu’il était devenu amoureux de Marie d’Angleterre épouse de Louis xii, qui n’avait point encore d’enfants. {b} La reine (à ce qu’on prétend) avait accordé un rendez-vous au jeune prince, qui se glissa pendant la nuit, par un escalier dérobé. Il était prêt à entrer dans l’appartement de Marie, lorsqu’un homme robuste l’enlève tout à coup et l’emporte, interdit et furieux. Cet homme ne tarda pas à se faire connaître, c’était Duprat. Quoi ! dit-il au duc avec vivacité, vous voulez vous donner vous-même un maître, et vous allez sacrifier un trône à un instant de plaisir ! Le duc d’Angloulême, loin de lui savoir mauvais gré de cette leçon, lui en marqua sa reconnaissance dès qu’il fut roi, et le fit chancelier en 1515. »


  1. Paris, Le Normant, an ix (1803), in‑8o.

  2. Le roi Louis xii mourut le 1er janvier 1515, trois mois après avoir épousé, en troisièmes noces, Marie d’Angleterre (1496-1533), sœur de Henri viii, roi d’Angleterre. Sans enfant mâle, Louis xii avait en 1512 choisi pour dauphin de France son lointain cousin, le duc François d’Angoulême, et l’avait marié le 14 mai 1514, à sa fille aînée, Claude de France. Un fils né de Marie d’Angleterre, pendant les neuf mois suivant la mort de son mari, aurait eu la capacité de ravir au jeune prince la couronne qui lui était promise.

48.

Catulle, Poèmes (lxiv, vers 19‑26) :

« Alors, dit-on, Pélée, {a} s’enflamme d’amour pour Thétis ; {b} alors, Thétis ne dédaigne pas les étreintes d’un humain ; alors, son père consent à unir Thétis à Pélée. Salut, héros nés dans ces temps trop désirables ! Salut, race des dieux ! Ô la bonne mère ! Je vous invoquerai souvent dans mes chants ; surtout toi Pélée, colonne de la Thessalie, dont un si heureux hymen a encore accru la gloire, toi à qui Jupiter en personne, le père des dieux lui-même, céda l’objet de ses amours ! » {c}


  1. Dans le mythe, Pélée était fils d’Éaque, roi d’Égine et de la Nymphe Eudéis.

  2. Thétis, fille de Nérée et de Doris, était la plus belle des Néréides. « Jupiter, Neptune et Apollon la voulurent épouser ; mais ayant appris que, suivant un ancien oracle de Thémis, il naîtrait de Thétis un fils que serait plus grand que son père, ces dieux cessèrent leurs poursuites et cédèrent la Nymphe à Pélée » (Fr. Noël).

    Achille, le héros grec de la guerre de Troie, naquit de cette union.

  3. Les allusions du Borboniana son transparentes : Jupiter, Louis xii ; Thétis, Marie d’Angleterre ; Pélée, le dauphin François d’Angoulême.

49.

Dès qu’il accéda au trône, François ier confina Marie d’Angleterre, devenue encombrante reine douairière à la mort de Louis xii (v. supra note [47]), dans l’hôtel de Cluny. Surprise en galante compagnie avec Charles Brandon, duc de Suffolk, Marie fut contrainte de l’épouser, contre la volonté de Henri viii, et de rentrer avec Brandon en Angleterre (mars 1515) où le couple vécut dans la disgrâce royale, et donna naissance à trois enfants, dont Frances Brandon (1517-1559), qui épousa Henry Grey, marquis de Dorset. Leur fille, lady Jeanne (Jane) Grey (1537-1554), devint reine d’Angleterre et d’Écosse à la mort d’Édouard vi (v. note [8] du Borboniana 8 manuscrit), qui l’avait désignée pour lui succéder comme princesse protestante ; mais elle ne régna que neuf jours (10‑19 juillet 1553) car sa cousine catholique, Marie Tudor (v. note [8] du Borboniana 3 manuscrit), lui ravit la couronne et la fit aussitôt décapiter.

« Madame Marbelle », Arbella Stuart (1575-1615), était le fruit d’un croisement entre les deux familles régnantes de Grande-Bretagne : fille unique de Charles Stuart, comte de Lennox, elle était aussi petite-fille, par sa mère, de Margaret Tudor. {a} Princesse catholique mariée au duc de Somerset, {b} Arbella vécut à la cour d’Élisabeth ire, {c} à qui elle était en position de succéder ; mais à la mort de la souveraine (1603), elle devint indésirable aux yeux de son cousin, le roi Jacques ier Stuart, {d} qui la tint prisonnière jusqu’à sa mort.


  1. Sœur aînée de Henri viii et de Marie d’Angleterre.

  2. Lui-même arrière-arrière-petit-fils de Marie d’Angleterre.

  3. V. note [6], lettre 511.

  4. V. note [17], lettre 287.

V. note [2], lettre 47, pour le Clément viii (pape de 1592 à 1605), qui soutint sans succès la cause d’Arbella.

50.

Évangile de Luc, 1:68‑71, prophétie de Zacharie :

Benedictus Deus Israhel quia visitavit et fecit redemptionem plebi suæ et erexit cornu salutis nobis in domo David pueri sui sicut locutus est per os sanctorum qui a sæculo sunt prophetarum eius salutem ex inimicis nostris et de manu omnium qui oderunt nos.

[Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, parce qu’il a visité et racheté son peuple, et qu’il a suscité pour nous une corne de salut dans la maison de David, son serviteur – ainsi qu’il l’a promis par la bouche de ses saints prophètes, dès les temps anciens – pour nous sauver de nos ennemis et de la main de tous ceux qui nous haïssent]. {a}


  1. Le Borboniana se servait de ce verset 71 pour ironiser sur les manœuvres de Sixte Quint et de Philippe ii : le pape et le roi d’Espagne étaient fort désireux de ramener dans le giron de l’Église romaine Jacques Stuart (1566-1625, v. note [17], lettre 287) : fils unique de Marie Stuart, converti au protestantisme, il a régné sur l’Écosse, sous le nom de Jacques vi (à partir de 1567), puis aussi sur l’Angleterre (à partir de 1603), sous le nom de Jacques ier.

51.

Emblème d’André Alciat (v. supra note [38]) intitulé Iusta vindicta [Juste vengeance], pages 185 de l’édition latine (Lyon, 1551) et 206 de l’édition française (Lyon, 1549) :

« En son creux roc, Polyphème assis chante
Entre son parc, cette chanson méchante :
“ Brebis, mangez l’herbe, et je mangerai
Les Grecs. Utis dernier dévorerai. ”
Oyant ceci, Ulysse l’œil lui crève.
En fin, l’auteur du mal a peine grève.

Commentaire :

« Polyphème, géant cyclope ayant un grand œil au front, {a} grand pasteur de l’île de Sicile au long de la mer, prit Ulysse et tous ses compagnons pour les dévorer, promettant manger Ulysse {b} le dernier, pource qu’il lui avait baillé du vin. Ce que voyant, Ulysse (qui s’était surnommé Utis, {c} c’est-à-dire, en grec, Nul) le fit tant boire de vin qu’il s’endormit. Lors Ulysse, d’un tison ardent, lui creva son œil. Par quoi, de la douleur, s’écria un tant horrible cri que tous les autres grands cyclopes du mont ardent Bolcas Gibelin {d} l’ouïrent, et vinrent lui demander qui l’avait ainsi aveuglé. Lors il répondit Utis, qu’est à dire “ nul ”. Par quoi, eux pensant qu’il fût devenu fol, s’en allèrent riant et se moquant, et le laissèrent. Par laquelle fable, Homère donne à entendre que les mauvais mangeurs de peuple, étant privés de la lumière de ce monde, souffriront la peine de leurs malfaits, et de nul ne seront secourus, mais de tous moqués et confus. » {e}


  1. La mésaventure du cyclope (v. note [10], lettre latine 10) surnommé Polyphème, c’est-à-dire « fameux », « dont on parle beaucoup », est un épisode de L’Odyssée d’Homère (chant ix, vers 315‑419).

  2. Odysseus (Ulysse ou Énée, v. note [14], lettre latine d’Adolf Vorst, datée du 4 septembre 1661) est surnommé Itachus, « l’homme d’Itaque », par Virgile dans L’Énéide (chant iii, vers 629), qui raconte la même aventure.

  3. Ουτις : personne.

  4. L’Etna, v. note [1], lettre 958.

  5. Le Borboniana appliquait cette fable aux relations entre les rois Philippe ii d’Espagne (mort en 1598), sous les traits de Polyphème, et Jacques vi d’Écosse (intronisé en 1567), sous ceux d’Ulysse. Philippe ne dévora pas Jacques, qui devint le roi Jacques ier d’Angleterre en 1603.

52.

Recipe [Prenez] est le mot latin (généralement symbolisé par ℞ ou Ꝝ) par lequel on a très longtemps commencé les ordonnances (recettes, recepta) médicales : v. notre glossaire.

Le premier vers est celui d’un poème satirique intitulé Recette pour guérir d’épidémie, mais que l’on n’y croie mye, {a} imprimé pages B.i. r‑vo d’un curieux recueil anonyme : {b}

« Deux Bourguignons de conscience
Et deux Bretons de sapience, {c}
Sans ordure deux Allemands,
Sans flatterie deux Normands,
Avec deux hardis Lombards,
Et sans baverie {d} deux Picards,
Et puis sans orgueil deux Français,
Et sans trahison deux Anglais,
Deux Flamands sans beurre manger ;
Et en boire un pot sans tarder,
Et pour mettre la chose à fin,
Deux prudhommes de Limousin ;
Broyez en un mortier d’étoupes
et trempez-la dedans vos soupes.
Si aurez bonne galimafrée, {e}
Oncques telle n’en fut trouvée
Pour défendre l’épidémie ;
S’il est vrai, nul n’y contredit. » {f}


  1. Guère ; l’épidémie était synonyme de peste.

  2. Les rues et églises de Paris avec la dépense qui se fait chacun jour. Le tour et l’enclos de ladite ville, avec l’enclos du bois de Vincennes et les épitaphes de la grosse tour du dit bois : qui la fonda, qui la parfit et acheva. Et avec ce la longueur, la largeur et la hauteur de la grand’église de Paris, avec le blason de ladite ville Et aucuns des cris que l’on crie parmi ladite ville (sans lieu ni nom ni date {vers 1529], in‑8o de 2 feuilles), dont la plus grande partie consiste en une liste des noms des vieilles rues parisiennes.

  3. Remplacé dans le Borboniana par « Deux Préigourdins en science ».

  4. Sic, probablement pour « braverie », c’est-à-dire « penchant à se vêtir richement et proprement » (Trévoux).

  5. Bon ragout.

  6. Pour dire que tous les ingrédients du remède son introuvables.

53.

Histoire générale de France de Scipion Dupleix, {a} tome iii, année 1522, pages 336‑337 :

§ xix « Lautrec retourne en France. Cependant Lautrec {b} se retira sur les terres des Vénitiens avec les troupes qui lui restaient, lesquelles s’écoulaient {c} tous les jours à faute de paiement ; et la seigneurie de Venise fit entendre à Lautrec qu’elle était lasse d’entretenir ce petit nombre de gens de guerre, vu même qu’ils demeuraient inutiles. À raison de quoi, il fut contraint de quitter entièrement l’Italie et de retourner en France. »

§ xx. « Causes de la perte du Milanais. Nous avons vu que ce seigneur (qui vraiment était grandement courageux) avait fait plusieurs manquements durant son gouvernement ; mais les plus grands qu’il fit durant cette guerre (laissant à part la tyrannie qu’il exerçait en temps de paix sur les Milanais) procédaient de deux choses. L’une était son ambition et la trop bonne opinion qu’il avait de lui-même, qui était cause qu’il ne déférait en rien aux bons avis et conseils de ses capitaines, et en avait toujours de particuliers, lesquels il exécutait afin qu’il ne semblât agir que par son propre jugement ; en quoi il s’estimait autant exceller sur les autres qu’en autorité. L’autre cause de ses manquements, et des malheurs et désordres qui les accompagnèrent, était la désobéissance des gens de guerre, lesquels ayant demeuré dix-huit mois sans solde n’étaient plus capables ni d’ordre ni de discipline militaire. Or, le défaut de leur paiement ne venait pas du roi, qui avait ordonné à cet effet quatre cent mille écus (aucuns {d} n’en mettent que trois), ni de Lautrec même, qui ne les reçut pas ; mais bien de l’avarice de Louise, mère du roi, {e} mal affectionnée à Lautrec ; laquelle les retira des mains de Jacques de Beaune, seigneur de Samblançay, surintendant des finances. » {f}

§ xxi. « Excuses de Lautrec envers le roi. Ainsi donc, Lautrec (si d’ailleurs il eût fait {g} bon devoir de gouverneur et de capitaine) avait fait beaucoup d’entretenir si longuement une armée avec de seules espérances de paiement. Néanmoins, le roi n’ayant pas encore connaissance de l’interversion de ses deniers, était si fort indigné contre lui qu’il ne le voulait pas voir à son retour d’Italie. Lui, qui ne se sentait pas coupable de ce côté-là, se présenta à Sa Majesté et lui proposa hardiment ses excuses, qui tendaient toutes là, qu’à faute d’argent, tout s’était perdu ; et lui remontra particulièrement que, pour retenir ses Suisses, il avait été contraint de combattre contre sa volonté à la Bicoque, {b} et que c’était beaucoup fait d’avoir entretenu un an et demi l’armée de Sa Majesté sans solde. »

§ xxii. « Samblançay condamné à mort par la malice de Louise, mère du roi. Le roi, étonné de ce discours, répond qu’il lui avait envoyé quatre cent mille écus pour l’entretènement de son armée. Lautrec lui repart {h} qu’il n’en a rien vu ni touché. Le roi fait appeler Samblançay, qui avait reçu commandement et ordre pour les envoyer. Celui-ci se décharge sur Louise. Le roi s’en va de ce pas dans la chambre de sa mère, et lui reproche que la perte de son duché de Milan est arrivée par sa faute, à cause qu’elle a retenu la finance ordonnée pour le paiement de son armée. Elle répond que les quatre cent mille écus qu’elle a reçus de Samblançay étaient les deniers qu’elle avait faits de sa réserve durant plusieurs années ; Samblançay, au contraire. {i} Mais comme en telles affaires, le fait tombe ordinairement sur le plus faible, le Chancelier Du Prat, {j} très confident à Louise et couvert ennemi de Samblançay (avec ce que leurs charges leur donnaient de l’émulation), fit en sorte que le roi, s’intéressant en cela pour sa mère, commanda qu’on lui fît son procès ; et afin de le perdre, le chancelier lui donna des commissaires par lui choisis pour ses juges, lesquels le condamnèrent à être pendu et étranglé ; et leur jugement fut exécuté. » {k}


  1. Paris, 1630, v. note [9], lettre 12.

  2. Odet de Foix, maréchal de Lautrec (v. note [47] du Borboniana 10 manuscrit), avait perdu la bataille de la Bicoque (à Bicocca, près de Milan, le 27 avril 1522) face aux armées de Charles Quint. Gouverneur du Milanais, Lautrec avait été contraint d’abandonner ce duché aux ennemis et de se replier sur Venise.

  3. Se dispersaient, désertaient.

  4. Certains.

  5. Louise de Savoie (1476-1531), duchesse d’Angoulême, mère du roi François ier, exerçait une puissante influence sur les affaires du royaume, mais on lui reprochait de privilégier ses intérêts politiques et personnels.

  6. Jacques de Beaune-Samblançay (Tours vers 1465-Paris 1527) avait été nommé surintendant des finances en 1518.

  7. Quand bien même il aurait fait.

  8. Réplique.

  9. Nie.

  10. V. supra note [47].

  11. L’affaire ne se résolut pas de manière si expéditive : Samblançay ne fut démis de ses fonctions qu’en 1524, après d’autres accusations de malversations ; embastillé en 1526, il fut pendu en 1527. Le récit raccourci de Dupleix explique pourquoi le Borboniana a donné 1522 pour année de la mort de Samblançay.

Fils de Guillaume de Beaune, qui fut maire de Tours, Renaud, archevêque de Bourges de 1581 à 1594 (v. note [46] du Borboniana 5 manuscrit), était petit-fils de Jacques, le surintendant des finances.

Charlotte de Sauve (1551-1617) n’était pas la « propre sœur » de Renaud, mais sa nièce, fille de son frère, Jacques de Beaune-Semblançay, second de ce nom. Marquise de Noirmoutier et l’une des dames d’honneur de Catherine de Médicis, Charlotte anima maintes intrigues de cour et eut plusieurs amants de haut rang, dont le plus célèbre a été (de 1572 à 1577) le roi Henri iii de Navarre (Henri iv de France en 1589).

54.

Le Borboniana se référait à deux textes de Jacques-Auguste i de Thou.

  1. « Thou sur sa propre vie, page 38 » ; citation a déjà été signalée plus haut dans le présent article : lib. 3 de vita sua, in initio, pag. 38 [au livre iii sur sa propre vie, en haut de la page 38]. À l’année 1584 de son autobiographe, Commentaria de Vita sua (livre iii), qui accompagne son Histoire universelle, de Thou a en effet longuement parlé d’Arnaud de Beaune (Thou b, volume 1, pages 100‑102), qui était étroitement lié à sa famille :

    « Il était petit-fils de Jacques de Beaune de Samblançay, auquel on fit son procès et qui fut condamné à une mort injuste et infâme, pour satisfaire la haine de l’impérieuse mère de François ier. […] {a}

    Il était d’un tempérament si chaud {b} qu’il avait besoin d’un aliment continuel pour entretenir sa santé, qui faisait sa plus grande attention. L’exercice ou le sommeil ne lui étaient point nécessaires pour digérer ; la chaleur naturelle y suppléait suffisamment : à peine dormait-il tous les jours quatre heures, au bout desquelles le besoin de manger le réveillait. À deux heures après minuit, ou même plus tôt, il se faisait donner à manger, se reposait ensuite et expédiait ses affaires particulières jusqu’à quatre heures, qu’il se remettait à table avec quelques-uns de sa maison qu’il faisait lever. À huit heures, on le servait pour la troisième fois ; il sortait après ce déjeuner pour les affaires publiques jusqu’à midi, qu’il rentrait chez lui pour dîner, toujours en bonne compagnie. Il mangeait encore à quatre heures, et le soir, sa table n’était pas moins bien servie que le matin ; cela n’empêchait pas qu’il ne mangeât encore avant que de se mettre au lit. L’hiver, il était toujours une bonne heure à table, et l’été, qu’il semble qu’on ait moins d’appétit, cinq quarts d’heure […]. »

    La suite, citée par le Borboniana, mérite une traduction plus fidèle à l’original latin (Historiarum sui temporis tomus iii, Francfort, Joachimus Wildius, 1658, in‑fo, page 1190) que celle de de Thou fr :

    « Ces soupers de promenade {c} le heurtaient tant qu’il déclinait invariablement les fréquentes invitations à dîner que lui faisait le premier prince. {d} Lui ayant demandé pourquoi il agissait ainsi, il lui répondit que sa manière de manger était plutôt celle d’un chien que celle d’un homme, voulant dire que les plats y passaient beaucoup trop rapidement. Ayant bien entendu la remarque du prélat, le prince promit de le recevoir non seulement somptueusement, comme il faisait toujours, mais longuement ; et quand il l’invitait, il ordonnait toujours à son maître d’hôtel de respecter un intervalle convenable entre les plats. »


    1. V. supra note [53].

    2. Latin d’origine : temperamento ad iram et violentos impetus natus videretur [semblant né avec un tempérament porté à la colère et aux emportements violents] ; soit une complexion à la fois bilieuse et sanguine (v. note [36], lettre latine 98).

    3. Traduction empruntée à Guy Patin, qui a cité ces mots dans sa lettre à André Falconet du 22 décembre 1665 (v. sa note [4]).

    4. Renaud de Beaune était le chancelier du duc d’Anjou et d’Alençon, François de France, premier prince du sang, comme frère puîné de Henri iii (v. note [13] du Borboniana 3 manuscrit).

  2. Pour éclairer ce qui est écrit juste après dans l’article, vide eundem Thuanum passim sub Henrico iv et præsertim pag. 1247 [voyez le même de Thou en plusieurs endroits sur le règne de Henri iv, particulièrement page 1247], je n’ai trouvé aucune édition latine de L’Histoire universelle (Historiæ sui temporis) qui soit antérieure à 1638 et dont un tome contienne un si grand nombre de pages. L’index du de Thou fr ne contient qu’une seule mention de Renaud de Beaune (mort en 1606) sous le règne de Henri iv, classée sous l’intitulé « Histoire de ce prélat ». Datée de 1592 (livre ciii, chapitre intitulé Projet pour faire un patriarche en France), elle ne revient pas sur les mœurs du prélat, mais sur sa réaction à une importante affaire politique et religieuse, qui décrit l’intervention de plusieurs évêques de France auprès du souverain, visant à le presser de justifier sa conduite à Rome, en y envoyant une délégation pour engager le pape Clément viii « à examiner en juge équitable les raisons de part et d’autre, afin de chercher les moyens de réconcilier le roi à l’Église, et de faire rentrer les ligueurs dans le devoir » (Thou fr, volume 11, page 495‑496) :

    « Le roi, sentant toute l’importance de cette affaire, qui demandait de mûres réflexions, avait fait venir de Tours Achille de Harlay, premier président, Jean Thumery, Jacques Gillot et Jean Villemereau, conseiller, pour examiner la chose avec eux. Ces magistrats firent de grandes instances auprès de Sa Majesté pour la détourner d’envoyer à Rome, parce que cette démarche donnerait atteinte à l’arrêt du Parlement qui y était formellement contraire. Renaud de Beaune, archevêque de Bourges, qui avait eu la charge de grand aumônier à la mort de Jacques Amiot, était présent à ces délibérations. Il courait un bruit qu’il secondait les intentions du Parlement, qui voulait qu’on établît en France une discipline indépendamment du pape, qui ne devait plus être regardé que comme l’ennemi du royaume. {a} Les ennemis de ce prélat, qui était déjà patriarche (dignité qui n’appartient en France qu’au seul archevêque de Bourges), disaient qu’il voulait être regardé dans le royaume, tant que le schisme y régnerait, comme le chef des évêques, par rapport aux dispenses et < à > la collation des bénéfices. le cardinal de Lenoncourt, qu’on avait accusé à Rome d’avoir les mêmes desseins, étant mort quelques mois auparavant à Blois, de chagrin par rapport à une injure dont on ne l’avait point vengé, tout le monde soupçonna l’archevêque de Bourges d’avoir succédé à ses prétentions. {b} Le cardinal de Bourbon qui, n’étant pas encore dans les ordres sacrés, ne pouvait posséder la dignité de patriarche, {c} ne voulant pas en voir un autre revêtu de cette dignité, s’opposa à ce projet, sous prétexte que ce coup d’éclat allait fortifier le schisme. Il insinua qu’il y avait une espérance de faire revenir le pape en faveur du roi ; et qu’au contraire, on en ferait par ce moyen un ennemi irréconciliable. » {d}


    1. Gallicanisme qui allait s’épanouir en richérisme dans les années 1610 (v. note [27], lettre 337).

    2. Philippe de Lenoncourt, évêque de Châlons-sur-Marne en 1550, reçu cardinal en 1588, était mort en 1592. Thou a conté son infortune dans le livre ci de son Histoire universelle (année 1591, Thou fr, volume 11, pages 350‑351) :

      « Dans le même temps, le cardinal Philippe de Lenoncourt, par le conseil de Madeleine d’Angoulême, {i} écrivit secrètement au roi pour l’instruire de ce qui se tramait à Tours, contre ses intérêts, par les princes de son sang. Mais cette lettre ayant ensuite été tirée des mains du roi par la perfidie d’un homme de sa Maison, qui était de la première noblesse, elle fut envoyée à ces princes. Irrités contre le cardinal, ils le traitèrent avec la dernière indignité ; et peut-être qu’ils auraient passé outre, s’ils n’eussent été retenus par son caractère. » {ii}

      1. Sic pour Diane d’Angoulême (Dianæ Engulismensis dans l’original latin), bâtarde légitimée du roi Henri ii (v. note [71] du Borboniana 4 manuscrit).

      2. « Peut-être seraient-ils allés plus loin si sa qualité de cardinal ne les avait retenus. »

    3. Charles ii de Bourbon (v. note [45] du Borboniana 5 manuscrit), cardinal de Vendôme nommé en 1583, ne pouvait pas prétendre diriger le clergé français car il ne fut jamais prêtre. Politiquement, il était l’âme du tiers parti, opposé à la fois à la Ligue et au roi (v. note [57], du Borboniana 5 manuscrit).

      Au sein du Conseil royal, Renaud de Beaune était le seul prêtre capable de se charger des affaires ecclésiastiques (c’est-à-dire de ce qui allait plus tard devenir le Conseil de conscience, v. note [3], lettre 686).

    4. Toutes ces tractations aboutirent à la conversion catholique de Henri iv en 1593, dont Arnaud de Beaune fut l’un des principaux artisans.

55.

« Voyez Pierre Matthieu sous Henri iv, page 719 » ; renvoi à l’Histoire de France… de Pierre Matthieu (Paris, 1631, tome second, page 719) : {a}

« René de Beaune, {b} archevêque de Bourges, qui avait fait le baptême essentiel de Monseigneur le dauphin, {c} mourut à Paris de 19e de septembre, cinq jours après le cérémonial, et fut enterré au chœur de l’église Notre-Dame. Il vécut 78 ans, passa par les plus illustres et honorables charges de sa robe, fut conseiller au Parlement, puis maître des requêtes de l’Hôtel du roi, chancelier de François de Valois, duc d’Alençon, frère de Henri iii, conseiller au privé Conseil de Sa Majesté, qui lui donna l’archevêché de Bourges. En cette dignité, il fit plusieurs actions publiques en la présence du roi. Il porta la parole pour le Clergé à l’Assemblée de l’an 1582, fit les oraisons funèbres du Chancelier de Birague, de M. le duc d’Alençon, de la reine d’Écosse et de la reine mère. {d} Il présida en la Chambre du clergé aux états de Blois, {e} et fit la remontrance de son ordre. Il servit constamment et courageusement le roi après la mort du roi Henri iii et fit connaître la diversité que la religion ne dispensait < pas > les ecclésiastiques de l’obéissance au prince légitime. Il en parla bien plus clairement en la conférence de Suresnes, {f} et travailla efficacement à la conversion du roi, lequel il reçut à l’Église ; {g} honneur que le pape attendait, {h} et pour raison de quoi, le nom de l’archevêque de Bourges devint autant odieux à Rome, comme celui des schismatiques. Ses services et ses mérites lui faisaient espérer le chapeau de cardinal et la confirmation de l’archevêché de Sens que le roi lui donna ; mais on opposa toujours qu’il avait préféré les respects de l’État à ceux de l’honneur de l’Église et de la religion. On lui doit la version française des Psaumes de David, qu’il fit par le commandement du roi Henri iii. » {i}


  1. Même page que l’extrait 3 transcrit dans la note [47] du Borboniana 8 manuscrit, à propos de Philippe Des Portes.

  2. Sic pour Renaud de Beaune.

  3. Le baptême essentiel (élémentaire, simplifié) était l’onction qu’on faisait, en petite cérémonie, immédiatement après la naissance d’un enfant. Chez les grands princes, on procédait plus tard à un baptême officiel, en grande pompe.

    Le dauphin, c’est-à-dire le futur roi Louis xiii, avait été ondoyé peu après sa venue au monde, le 27 septembre 1601, et baptisé officiellement le 14 septembre 1606 au château de Fontainebleau. Arnaud de Beaune, mort le 27 (et non 19) du même mois, y avait officié avec plusieurs autres prélats, sous l’office du cardinal de Retz (premier de ce nom, Pierre de Gondi, nommé en 1587, mort en 1616). Le récit de Matthieu contient donc ici deux inexactitudes.

  4. V. notes [35], lettre 327, pour René de Birague, mort en 1589, et pour Catherine de Médicis, morte en 1589 ; [54] (première notule {d}) supra pour François de France, duc d’Alençon, mort (de maladie) en 1584 ; [32], lettre 554, pour Marie Stuart, morte (décapitée) en 1587.

  5. Seconds états tenus à Blois, d’octobre 1588 à janvier 1589 (v. note [11], lettre latine 75).

  6. Mai 1593, v. note [2], lettre 13.

  7. Le 25 juillet 1593, v. note [18], lettre Borboniana 4 manuscrit.

  8. Avec la plus extrême impatience.

  9. V. notule 2‑{c}, note [47] du Borboniana 8 manuscrit, pour cette édition (Rouen, 1600).

56.

« il était fort négligé en ses mœurs ».

Andilly-en-Bassigny est une petite ville de Champagne, une vingtaine de kilomètres à l’est de Langres (v. supra note [18]). Jean Crassot (v. note [6] des Affaires de l’Université en 1650-1651 dans les Commentaires de Guy Patin sur son décanat) y était né vers 1585 ; régent de philosophie à Paris, il y était mort en 1616.

57.

La bibliographie de Crassot compte une demi-douzaine d’ouvrages, tous posthumes et consacrés à l’aristotélisme, dont notamment :

Méru est une petite ville de Picardie (Oise), à mi-chemin entre Pontoise et Beauvais. V. notes :

Balthazar Gobelin avait été nommé président de la Chambre des comptes de Paris en 1604, après avoir été trésorier général de l’Artillerie (1571), trésorier de l’Épargne (1589) et conseiller d’État (1600) ; il mourut en 1620 (Popoff, no 1313).

58.

Alexander ab Alexandro (Alessandro d’Alessandro, Naples 1461-Rome 1523), jurisconsulte et érudit italien, est connu pour un ouvrage inspiré des savantes Nuits attiques d’Aulu-Gelle : {a}

Alexandri de Alexandro Dies geniales.

[Les Jours nuptiaux d’Alessandro d’Alessandro]. {b}

Le chapitre xv du livre troisième, Solere futuras calamitates, multo ante signis præmonstrari, et miraculum quo vastitas Regni Neapolitani prædicta fuit [Des signes anticipent de fort longue date les catastrophes futures, et le prodige qui prédit la dévastation du royaume de Naples], du livre iii, évoque la prise de Constantinople par les Turcs (1453) {c} en ces curieux termes (page cxi vo) :

Patrum nostrorum memoria evidentissimis ostentis, antequam in Ponto Bizantium ab immanissimis Turcis terra, marique oppugnaretur, quo excidio quanta calamitas quantumque vulnus Christianæ reipublicæ illata fuerint, nemo ignoravit, compertum est, apud Comum citerioris Galliæ urbem, vergente ad occasum die, ingentem canum multitudinem per aera ferri. Postquam diversorum pecorum armenta. Species peditum primo levis armaturæ, deinde hastatos scutatosque subsequi, equitesque in turmas divisos ingenti instructa acie prosequutos, horis ferme tribus, imaginem adventantis exercitus præbuisse. Demum corpore procero immanem et formidabilem hominem supra quam dici possit, veluti exercitus ductorem terribili equo insidentem processisse aliaque ludibria oculorum per inane apparuisse ingentium malorum prænuncia. Donec nocte appetente visio omnis illa dissipata est. Quæ ostenta futurum excidium, cædem et calamitatem quæ postea urgentibus satis sequuta sunt : præsignasse nemo dubitavit.

[Nos pères, nul ne l’ignore, se rappellent les très évidents prodiges survenus avant le sauvage assaut des Turcs, par terre et par mer, contre Byzance, ce qui fut cause d’un immense malheur et d’une profonde blessure pour la chrétienté. Ainsi, une énorme quantité de chiens s’est transportée par les airs, en fin de journée, dans la ville de Côme, en Gaule cisalpine ; {d} ils furent bientôt suivis par des troupeaux de bestiaux divers, puis par l’apparition de fantassins, d’abord légèrement armés, puis munis de lances et de boucliers ; vinrent après des cavaliers répartis en escadrons, pour former une immense troupe rangée en ordre de bataille ; en quelque trois heures, on a vu le fantôme d’une armée qui s’approchait. Un homme prodigieux et formidable, au corps gigantesque, qui semblait en être le chef, monté sur un cheval effrayant, s’est alors avancé ; et par illusion, sont apparues d’autres visions annonciatrices d’immenses malheurs ; jusqu’à ce que, la nuit venant, cette chimère disparût tout entière. Elle préfigurait la destruction, le massacre et la catastrophe qui sont survenus assez peu après, et nul n’a douté qu’elle les annonçait]. {e}


  1. V. note [40], lettre 99.

  2. Sans lieu, ni nom, ni date [Rome, 1522], in‑fo de 568 pages, ouvrage divisé en six livres, avec ce sous-titre :

    Nequis opus excudat denuo infra Septennium, sub diris imprecationibus, apostolica authoritate, interdictum est.

    [On ne sait qui a de nouveau imprimé cet ouvrage que l’autorité apostolique a interdit voilà moins de sept ans, sous d’effrayantes menaces].

  3. V. note [3], lettre 929.

  4. En Lombardie.

  5. J’ai peiné à croire ce que j’écrivais en copiant puis en traduisant cette hallucinante apocalypse de Côme.

59.

Ce latin est un emprunt inavoué du Borboniana à la notice que Theodor Zwinge a écrite sur Alexander ab Alexandro dans son Theatrum Vitæ humanæ [Amphithéâtre de la Vie humaine] : {a}

Theatri Humanæ Vitæ Volumen Sextum de Philosophicis Habitibus Practicis ad Boni cognitionem simul et possessionem primario conferent. tribus libris universim tractans.

[Volume sixième de l’Amphithéâtre de la Vie humaine, traitant généralement en trois livres des coutumes philosophiques pratiques, qui contribuent principalement à la connaissance, ainsi qu’à la jouissance du bien]. {b}

En voici le texte complet (avec mise en exergue du passage cité par le Borboniana), livre i, page 1575, bas de la première colonne) :

Alexander ab Alexandro Neapolitanus, qui Pontani aetate vixit, et Genialium dierum libros sex doctiss. scripsit, professione fuit Iurisconsultus, in qua eo usque progressus est, ut et in agro Neapolitano, et Romæ causas sæpe defenderit : ubi et aedes ostentis umbrarumque illusionibus infames se aliquando incoluisse scribit, ac in agro Vaticano prædiolum habuisse. Tandem ubi in iudiciis gratia et corruptionibus omnia transigi videret, patronisque contra vim potentiorum nihil amplius praesidii esse : relicto foro, et causarum actionibus, in mitioribus studijs ætatem consumsit : satius esse ducens, ut ipse de se inquit, modico civilique cultu contentum vivere, quam bona animi turpi quæstu pessimo exemplo fœdare.

[Alessandro d’Alessandro, natif de Naples, qui vécut au temps de Pontanus {c} et écrivit les six très savants livres des Dies geniales, fut jurisconsulte de profession ; il s’y est tant élevé qu’il a souvent plaidé des procès, à Naples comme à Rome, où il a parfois habité, écrit-il, dans des maisons hantées par les prodiges et les ombres fantomatiques, et il y a possédé un petit domaine sur le mont Vatican. Enfin, quand il se rendit compte que, dans les jugements, tout s’accommodait par faveurs et corruptions, et qu’il n’y avait alors plus aucun recours contre la volonté des puissants, il abandonna le tribunal et les plaidoiries pour occuper son temps à de plus douces études : « plus content, dit-il lui-même à son propre propos, de vivre modestement et doucement, que de gâcher ce qu’il y a de bon en l’esprit à rechercher honteusement ce qui s’y loge de pire »]. {d}


  1. V. note [34], lettre 297.

  2. Bâle, Eusebius Episcopus, 1586, in‑fo de 1 690 pages (numérotées de 1 556 à 3 246).

  3. Giovanni Pontano (1426-1503, v. note [38] du Naudæana 2).

  4. Ce propos d’Alessandro (entre guillemets) est tiré du livre vi de ses Dies geniales, fin du chapitre xvi, Quid responderim Hieronimo Massaino, cur in in eodem forem statu semper cum ad honores admitterentur alii [Ce que j’ai répondu à Hieronimus Massainus (Girolamo Massaini, chanoine érudit mort en 1527), afin de lui expliquer pourquoi je resterai toujours dans la même charge quand les autres seront admis aux honneurs] (pages cclxvi ro, dans l’édition de 1522, v. supra note [58]).

60.

Andreæ Tiraquelli Regii in Curia Parisiensis Senatoris, Semestria in Genialium Dierum Alexandri ab Alexandro Iurisperiti Neapolitani, lib. vi. Cum Indide Capitum, Rerumque et Verborum locupletissimo.

[Les Semestres d’André Tiraqueau, {a} conseiller au Parlement de Paris, sur les six livres des Dies geniales d’Alessandro d’Alessandro, jurisconsulte napolitain. Avec un très riche index des chapitres, et des matières et des mots]. {b}


  1. V. note [2], lettre 597.

  2. Lyon, héritiers de Gulielmus Rovillius, 1614, in‑fo de 748 pages, avec portrait de Tiraqueau.

Cette édition critique est riche de copieuses notes critiques, mais elles m’ont déçu :

Le Borboniana, en partie inspiré par l’éloge que Jacques-Auguste i de Thou a donné de Tiraqueau (Histoire universelle, règne de Henri ii, année 1558, Thou fr, volume 3, page 301), citait deux autres de ses ouvrages :

Le compte me semble exact pour les 12 livres de Tiraqueau, mais Popoff (no 2362) et le Faux Patiniana II‑4, qui a repris cet article (v. sa note [13]), lui ont attribué 30 enfants.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Ana de Guy Patin : Borboniana 9 manuscrit

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(Consulté le 26/04/2024)

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